Fanfiction - 3ème Saison
« Les jeux sont faits »

1- 2- 3- 4- 5- 6- 7- 8- 9- 10- 11- 12- 13- 14- 15- 16- 17- 18- 19- 20

19- La fin du cauchemar

- Elle avait une vidéo de toi… de Thunder. Elle savait qui tu étais, donc qui nous étions.

Les mots de Takeshi continuaient de résonner dans sa tête. Du coin de l’œil, elle regardait Michiru qui n’avait pas l’air de se rappeler de quoi que ce soit. Quant à Ryu, il n’était même pas venu en cours.

Lorsque Takeshi avait voulu mettre de la distance entre Michiru et lui, celle-ci l’avait très mal pris, et était prête à tout pour le récupérer, quitte à le faire chanter. Non contente d’avoir semé le trouble dans la pension en y laissant ses objets personnels, la jeune fille voulut passer à la vitesse supérieure…
Connu des services de police pour avoir tabassé un garçon innocent et avoir pris la fuite, Michiru avait prévenu Takeshi qu’elle pouvait revenir sur sa décision et ajouter quelques méfaits qu’il aurait eu du mal à réfuter dans la position qu’il occupait. Mais comme cela ne semblait pas effrayer le garçon, elle lui montra une petite vidéo prise par son téléphone portable où on voyait clairement Denchu se transformer.
Cette vidéo aurait été une mine d’or pour le commissaire Kaioh car elle n’était pas sans rappeler l’incident du lycée inondé et le principal suspect qui s’était échappé on ne sait comment…

- Si je dévoile cette vidéo à mon père, sans oublier d’en informer les journalistes, bien entendu, ta petite Denchu en subirait les conséquences les plus terribles. Mais tu me connais… Je suis assez sensible et je n’aime pas voir les gens souffrir… Alors, en échange de mon silence, tu devras m’obéir… Et pour commencer, petit Toutou – Oh, ça ne te dérange pas que je t’appelle comme ça, vu comment tu rampais aux pieds de ta blonde ? – tu vas te convaincre que je suis la femme de ta vie, et tu ne me quitteras pas tant que je ne te l’aurai pas ordonné ! Oh, j’oubliais… ce n’est pas la peine d’essayer de supprimer la vidéo de mon portable. J’en ai fait plusieurs copies !

Oui… la conversation aurait pu ressembler à ça. Du moins, en se fiant aux paroles de Takeshi, c’est ce qui ressortait directement de l’esprit de Denchu.

Quelle garce…
Cette mascarade avait renforcé la confiance naissante de Denchu envers le jeune homme, et elle se jura de ne plus s’arrêter aux premiers agissements de Takeshi.
La fin de la semaine s’annonçait légère. Le week-end sonnerait dans quelques minutes seulement, et pour la première fois depuis des mois, Denchu se sentait de taille à abattre un démon s’il pointait le bout de son nez !

~*~

Ah… On y est…
Toya venait de chercher le courrier et trouva la dernière lettre de rappel pour la participation au bal de fin d’année. La date limite était fixée à la semaine prochaine et il devait prendre une décision. Sur le chemin de l’entrée, il croisa Denchu, son plus proche soutien.

- Dis-moi, tu y vas au bal… ? S’enquit celui-ci.
- Oui, bien sûr, pourquoi ?
- Ben, il faut rendre le coupon d’invitation la semaine prochaine, et…
- Oh, attends ! Tu vas pas me dire que tu n’y vas pas ! Allez, quoi, c’est le bal de fin d’année ! S’indigna Denchu.
- Oui, enfin comme on doit être accompagné, je me disais que…
- Ah non, ça c’est un mythe ! Enfin, pas vraiment. Si tu viens accompagné, tu as droit à moitié prix pour tout, mais tu peux venir seul aussi.
- Oui, enfin ça reviendrait cher… Hey, mais on peut mentir ! Se réjouit-il.
- Oh, oui, tu peux mentir… mais ça ne se fait pas en général. Celle qui sera ta cavalière aura une sévère désillusion…
- Sauf si c’est toi !
- Non, désolée, je suis déjà invitée.
- Par qui ?
- A ton avis… Bon, je te laisse, je suis en retard. A plus !
- Denchu, tu ne m’aides vraiment pas, là !

Et Denchu de s’en aller pour son entraînement du samedi, laissant seul Toya face à un ultimatum.
Décidant de ne pas faire durer son supplice plus qu’il ne se doit, Toya grimpa à l’étage et toqua à la chambre que Deshi partageait avec Denchu.

- Entrez…
- C’est moi.
- Je l’ai deviné, répondit Deshi sans lever les yeux de son ordinateur.
- A quoi tu l’aurais deviné, répliqua Toya, courroucé.
- A ton toquement et aux bruits de tes pas dans l’escalier. C’est pour quoi ?
- T’as qu’à le deviner, répliqua-t-il, agressivement.
- Okaay… donc je n’ai pas le droit de prononcer le mot « deviner » en ta présence, c’est ça ? Ou tu as décidé de passer tes nerfs sur…
- Je m’excuse…La coupa-t-il, d’une voix sincère en s’asseyant sur le bord du lit.
- Oh non, là ce serait trop simple, reprit-elle en croisant les bras.
- Je suis désolé, mais je… je n’arrive plus à ressentir quoi que ce soit, et ça me perturbe… je prends tout pour une agression, et je me sens…
- Faible.

Toya ne répondit pas et laissa reposer son menton dans ses mains.

- C’est mignon ! Concéda-t-elle. Agaçant, mais mignon. Bon, tu voulais me dire quoi ?
- Euh, tu as vu, il faut envoyer la réponse pour le bal cette semaine.
- Oui, moi c’est fait depuis longtemps.
- Ah, et tu y vas ?
- Oui, et je bénéficie d’une réduction ! S’enjoua celle-ci.
- Oh… ah… ok… bon, ben si tu es au courant, c’est bien. Je retourne voir les autres en bas.

Il se leva et se dirigea vers la porte. Son sang lui était tellement monté à la tête qu’il ne sentait que des fourmis dans ses jambes, et pour la première fois, il ne contrôlait plus les frasques de son esprit.

- Et toi, tu y vas ? Lança Deshi.
- Non.
- Oh ? Pourquoi ?
- Trop cher pour si peu.
- Pff, si ça n’est que le prix qui t’arrête, tu peux entrer à moitié prix si tu as une cavalière, tu sais…
- Oui, mais la personne que je voulais inviter est déjà prise, donc ce n’est pas la peine, je n’irai avec personne d’autre.
- C’est juste une soirée. Ca ne te lie pas à vie avec cette personne. Tu voulais inviter Denchu, c’est ça ? S’irritait un peu la jeune fille.
- Non, dit-il enfin en passant le seuil de la porte.
- Alors qui ?!

Elle l’entendait descendre les marches de l’escalier, et ses pas résonnèrent dans sa tête en retraçant le fil de sa conversation.
Elle reboucha en vitesse son stylo, mit en veille l’écran de son ordinateur et se précipita dans les escaliers à la suite de Toya.
Elle ne fut qu’à moitié surprise de le voir à mi-chemin, et ne prit pas la peine de tourner sept fois sa langue dans sa bouche…

- C’est moi ? Tu es venu pour… enfin, pas uniquement pour me transmettre la deadline.
- Tu es sûre que ce n’est pas avec toi que j’ai échangé mon pouvoir ?
- Et pourquoi crois-tu que je suis… Ah ! Souriait tendrement Deshi. La réduction… c’est parce que c’est un ami de mes parents qui s’occupe de la sono. Enfin, effectivement, je vais au bal.
- Y vas-tu accompagnée ? Demanda Toya sur le même ton innocent.
- Non, je le crains…
- Aurai-je l’honneur d’y aller à tes côtés ?
- Mmmh… Je ne dis pas non.
- Eh bien, je te dis au mois prochain à la salle des fêtes.

Toya rejoignit les autres au salon, et c’est le cœur léger que Deshi rejoignit son ordinateur, sans pouvoir se concentrer sur ses recherches.
Elle ouvrit alors son tiroir et en retira un scan d’une photographie que Takeshi lui avait remis sous contrainte, montrant une petite fille blonde d’environ huit ans, mangeant goulument une barre de chocolat, avec à ses côtés son aîné d’un an, la regardant en biais avec une moue timide, les joues rouge d’avoir contentée la gourmande qu’il aimait voir sourire.

~*~

Depuis que Denchu s’était réconciliée avec Takeshi, les relations envers chaque membre de la pension semblaient s’améliorer, parfois même avec précipitation. C’est ainsi que Satoshi affirma à Kasumi qu’elle devait l’accompagner au bal. Interloquée, celle-ci lui en demanda la raison :

- Et pourquoi je n’aurai pas le choix… ?
- Parce que Fumio veut t’y inviter, et pour t’éviter de donner une fausse excuse, tu auras une bonne raison de refuser puisqu’on t’a déjà invitée.
- Ah ? Fumio, tu dis… Répondit Kasumi, l’air absent.

Le jeune homme jeta un lourd regard en biais, et Kasumi, qui le remarqua ne fit rien pour le soulager.

- C’est vrai qu’il est pas mal… Ce sera une demande sincère venant de sa part, je pense… Non ?
- Sincère… ? Répéta Satoshi, avec une intonation moqueuse.
- Oui, je n’y vois aucun mal là-dessous. Pourquoi ça te gène tant que ça qu’il me demande ?
- Oh… Pour rien, je voulais juste t’épargner le fait de t’afficher avec un blaireau, rétorqua-t-il.
- Nous n’avons pas la même définition de « blaireau », à mon avis. Fumio est l’un des plus populaires du collège.
- C’est bien ce que je dis ! Un blaireau. Un mec sans cervelle qui ne sait que rouler ses muscles… et qui n’a même pas de coui…
- Pardon ?! Je peux savoir d’où tu tiens ces informations douteuses ? Commençait à s’irriter la jeune fille.
- De… du fait qu’… qu’il… euh…
- J’attends… Colporteur de ragots envieux…
- Il a eu besoin de moi pour essayer sortir avec toi !! S’énerva-t-il avant de placer sa main sur sa bouche pour effacer l’énormité de ce qu’il avait dit.

Kasumi resta interdite et Satoshi espérait bien retirer ce qu’il venait de dire en balayant sa main sur le côté.

- Alors ça… c’est l’ineptie la plus puissante que tu aies jamais réussi à sortir… susurra Kasumi. Se servir de toi…
- Le problème n’est pas là ! S’emporta Satoshi. Ce que je veux dire depuis tout à l’heure, c’est qu’il ne faut pas qu’on se disperse avec eux. C’est trop dangereux de les confronter ici, avec nos pouvoirs… et…
- Te fatigue pas, je n’aurai pas voulu l’accompagner. Il est bien plus arrogant que toi et pour le supporter plus de cinq minutes…
- Oh vraiment ? Sourit bêtement Satoshi, ayant visiblement fait abstraction de la dernière phrase de Kasumi.

La jeune fille eut un mouvement de recul avant d’éclater de rire face à la détermination que Satoshi dépensait pour défendre son point de vue se fondant littéralement au soleil à la prononciation de quelques mots :

- Ok, ok ! Je viendrai avec toi ! Mais à une condition que tu ne devras pas refuser ni esquiver !
- Mmh… Laquelle ? Grogna le jeune homme.
- Tu me fais une véritable demande, pas une demande qui cache un sacrifice de mauvaise foi…
- …
- Tu n’es pas obligé de me la faire maintenant, tu as encore une semaine !

Satoshi gonfla les joues, prêt à exploser, puis se découragea et partit dans sa chambre.

~*~

- C’est décourageant… Tout le monde ne parle que de ça, et les filles ont les hormones en ébullition, ça va être la cinquième que j’envoie…
- Si tu es là pour te vanter, Yugo, tu peux repartir tout de suite, rétorqua Yuko, peu intéressée par sa conversation.

Assis sur le bureau de la jeune fille qui semblait être absorbée par le tableau, effacé de toute note, Yugo laissa échapper un petit rire coupable.

- Je me doutais bien que ça n’allait pas être la meilleure technique d’approche. On va être plus direct, est-ce que tu…
- Non, je ne vais pas au bal.
- Tu rates quelque chose.
- Qu’est-ce que tu peux en savoir ? Tu viens d’arriver cette année.
- Je ne te parlais pas de l’évènement en lui-même…

Yuko n’avait pas détaché son regard du tableau noir, mais son esprit n’était plus concentré, et elle sentait déjà le sang affluer à ses joues. Elle se pencha pour prendre un livre dans son sac et mettre son embarras écarlate sur le compte de cet effort. Du coin de l’œil, elle voyait que Yugo la regardait avec un sourire mesquin en coin.

- Je ne ferais pas cette tête-là si j’étais à ta place. Une de tes groupies va tenter sa chance.

Le jeune homme se retourna vivement et se trouva face à une jeune fille que Yuko avait croisée plus d’une fois.

- Nanako ?! Tu n’es pas en cours ? Lui demanda Yugo sur un ton de reproche.
- On nous a annoncé que le professeur avait au moins un quart d’heure de retard. Je peux te parler deux minutes ?
- A vrai dire… Le prof risque d’arriver d’une minute à l’autre et…
- Ce ne prendra pas longtemps. A moins que je ne te dérange ? Reprit-elle en fixant son regard sur Yuko qui ne cilla pas.

Le jeune homme se leva, et Yuko poussa un soupir dans lequel on pouvait entendre un soulagement certain. Quant à Yugo…

- Tu n’as pas besoin de venir, ok ? Je sais ce que je fais. Ne t’approche plus de quiconque, car pour le moment on ne peut pas vraiment dire que tu les as affaibli…
- Yugo… A t’entendre, j’ai l’impression que tu cherches à t’éloigner de nous pour te rapprocher d’elle. Notre objectif est de la ramener, pas que tu en fasses ton exclusivité, qui plus est, je ne vois vraiment pas ce qu’elle a d’exceptionnel…
- Je me souviens d’une phrase que j’ai apprise il y a peu… Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse ! Souligna-t-il en perçant du regard son interlocutrice importune.
- …
- Ca ne sert à rien de poursuivre avec lui, Nanako… Les interrompit Oriba.

~*~

- Donc maintenant, tu pourras… avoir ta broche également ! Conclut Kima, après que Denchu lui eut expliqué dans son ensemble le petit périple qu’elle avait vécu un mois plus tôt.
- Oui, si ça se trouve, c’est ce petit passage de déprime qui a fait que je ne me concentrais pas bien…
- Tout de même ! Il aurait pu nous en parler, non ? Pourquoi il ne l’a dit qu’à toi ?! S’insurgeait la jeune fille.
- Je crois le savoir, mais je n’en suis pas sûre…
- Et donc ?
- Il ne veut plus passer par de nombreux détours pour parler de quelque chose qui me concerne. Enfin bref, tu vas au bal ?
- Oui…
- Avec Oriba, c’est ça ?
- Ah oui… c’est vrai qu’il me l’avait demandé en octobre dernier, mais non, j’avais refusé. J’espérais qu’entre Haneru et moi, ça s’arrange.
- Et… ça s’est arrangé ? Demanda Denchu avec hésitation.
- On peut dire ça, oui. On agit plus ou moins comme si rien ne s’était passé, comme si nous étions de bons amis, mais sans plus… sans plus.
- Pourtant, tu nous avais dit qu’il tenait toujours à toi…
- Mais qu’il ne pouvait pas me promettre de ne plus me faire souffrir. Je suis une sorte d’accessoire, même s’il ne me l’a pas dit comme ça. Je pense qu’il se sent incapable de « s’occuper » de moi.

Kima n’eut pas le temps de terminer sa phrase car quelqu’un venait de se jeter sur elles en les enserrant par la taille :

- Coucou vous !! Vous m’attendiez ?!
- Ah ! Haneru ! Euh, oui, entre autres ! Répondit précipitamment Denchu.
- Vous parliez de quoi ?
- De la fête de Satoshi, c’est aujourd’hui qu’on la lui souhaite… Et toi, tu m’as l’air bien heureux… Répondit suspicieusement Kima.
- Ouaip ! Alors c’est pour ça qu’il s’est lancé !
- Qui ça ? Demanda Denchu en se défaisant délicatement du bras de Haneru.
- Satoshi ! Il a demandé à Kasumi d’aller au bal avec lui !
- Comment tu sais ça ? Reprit Kima.
- Ce midi, j’ai croisé Satoshi qui ressortait d’un magasin de vêtement pour damoiselle, avec un paquet sous le bras. Je lui ai demandé ce qu’il comptait faire avec ça, et il m’a répondu que c’était pour inviter Kasumi au bal.
- Je ne vois toujours pas le rapport avec le fait qu’il se soit lancé et sa…
- Fête ? Si je réfléchis comme lui, je me trouverai un avantage de proposer à ma dulcinée une invitation : le jour de ma propre fête on ne peut rien me refuser, non ? Hélas… la mienne est le 31 octobre… toujours évincée par Halloween…
- Et ce qui te rend heureux, c’est ? Reprit Kima.
- Le fait que Satoshi prenne une telle initiative, lui répondit-il en plantant son regard dans les yeux de Kima. Et toi… tu as l’air contrariée, non ?
- Euh, je vais vous laisser, intervint Denchu sans être sure qu’ils l’aient bien entendu.
- Non, pas plus que ça…
- Tu vas au bal avec Oriba ?
- Oui, le défia-t-elle.
- Ah, c’est bien ! Moi, j’ai pensé y aller avec Yuko pour l’obliger à sortir un peu, mais je suis pas certain qu’elle le prendra bien vu que j’ai apposé son nom sur l’invitation sans consentement de sa part. Enfin, on verra bien sa réaction sur le vif.

Kima détourna le regard. Elle s’en voulait d’avoir menti à l’instant, elle voulait le blesser un peu, le voir dans l’embarras alors qu’il voulait l’inviter. Mais au final, la réaction qu’elle attendait n’était pas venue. Il avait déjà fait son choix… Il avait invité sa sœur. En soi, tout allait pour le mieux : il ne s’agissait pas d’une autre fille… Mais il ne m’a pas proposé…

~*~

En s’éloignant, Denchu avait décidé de rentrer à la pension en coupant par les bois, et peu importait la mise en garde générale qui consistait à ne jamais se déplacer seuls. Maintenant, elle savait à quoi s’attendre, et elle attendait de pied ferme ses démons intérieurs afin de récupérer à son tour sa broche…
Et ses prières furent entendues. Des lianes jaillirent du sol et vinrent s’enrouler autour d’elle. C’est tout ce que vous avez trouvé ? Elle résista un peu, le sourire aux lèvres et lorsqu’une liane se figea à son cou, elle décida de sortir son stylo pour se transformer tant qu’une de ses mains était encore libre.
Thunder libéra son énergie de tout son corps. Les liens se brisèrent nets.

- ALORS ?! C’EST TOUT CE QUE VOUS SAVEZ FAIRE ?!

A les provoquer ainsi, son souhait venait de s’exaucer. Elle allait enfin avoir son combat, son évolution. De nouvelles lianes jaillirent de tous les branchages, pour la capturer, et elles s’enroulèrent aussitôt pour l’amener avec elles. Traînant par terre, Thunder se couvrait d’égratignures. Elle tenta de se raccrocher à une souche, mais son bras fut ramené à son corps par une autre liane. Elle était totalement ligotée.
Elle heurta un arbre, et sentit que le tronc de celui-ci s’ouvrait et les lianes l’aspirèrent à l’intérieur. L’écorce se reconstitua et Thunder était capturée. Les lianes se rétractèrent et la laissèrent, coincée ici, sans espace pour bouger. Là, elle commençait à paniquer.

Elle tenta de lancer quelques décharges, mais n’avait pas assez de recul pour pouvoir lancer sa charge maximale. Elle réussit néanmoins à libérer son électricité, mais lorsque l’arbre fut touché, il resserra son étreinte. Thunder étouffait et l’information de sa claustrophobie montait à son cerveau… qui se déconnecta de lui même.

~*~

Elle voulait coûte que coûte rester lucide, mais ses yeux se fermèrent d’elle-même. Elle ne pouvait plus lutter. L’air était irrespirable, ses muscles atrophiés. Ouvre les yeux…
Elle se vit. D’en haut, elle voyait son corps flotter… mais pourquoi avait-elle si mal alors que tout autour d’elle n’était que vide et espace ? Elle referma les yeux, et lorsqu’elle les rouvrit, elle se retrouvait dans le corps qu’elle avait vu. Face à elle, une lueur rose qu’elle laissa venir à elle, confiante. Ca ne peut être que ça…

~*~

En rouvrant les yeux, elle se sentait prête. Elle fit d’abord circuler toute l’électricité environnante le long de son corps, et par les fissures faisait pénétrer le vent.
A peine quelques centimètres d’espace maintenant, l’arbre absorbait une grande partie du pouvoir, mais elle était plus forte : elle pouvait maintenant tout délivrer sans se faire écraser.
Alors, prise d’une violente envie de tout détruire, elle plaqua ses bras contre la paroi et hurla de toutes ses forces en dégageant toute son énergie. Elle se libérait de ses derniers mois, de toute sa colère contre le garçon qui l’avait fait souffrir, contre celui qu’elle avait laissé partir, contre son incapacité à saisir le moment venu, contre tout ce qui l’avait empêché d’avancer.

~*~

Tiens… Il pleut.
Yuko rabattit sa capuche mais n’accéléra pas sa démarche pour autant.
Elle était de corvée de course ce soir là, et l’air frais et humide ne l’indisposait pas. Il était rafraîchissant, et rinçait ses idées noires…
Elle fit ses achats sans incident, et eut même l’amabilité d’adresser un « bonsoir » et un « merci, bonne soirée » à la caissière qui n’était pourtant pas des plus aimables.
En sortant du magasin, elle se heurta à un client qui lui retint le bras pour qu’elle ne trébuche pas plus.

- Décidément, tu chancelles souvent, non ? La salua Yugo.
- Laisse-moi passer, répondit-elle faiblement.
- Oh… Pas de contre attaque, je ne te reconnais pas, tu es sûre que ça va ?
- …
- Bon, donne-moi tes courses, je te raccompagne, lui dit-il doucement.

En chemin, elle n’était pas plus bavarde, et Yugo ne l’encourageait pas à combler le silence.
Peut-être était-ce la meilleure des solutions car la jeune fille – sûrement se croyant seule – finit par murmurer ce qui l’empêchait de marcher en regardant droit devant.

- Ce bal… ça ne fait qu’accélérer les choses…

Yugo l’entendit. Par délicatesse, il ne répondit rien. Par politesse, il la regarda.

- Ils sont tous là… à afficher leur bonheur. Ils ne se soucient que de leur personne, de leur plaisir, et ils l’affichent à tout va. Ils n’ont pas l’esprit de… de m’épargner…

Une goutte d’eau vint se mêler à la larme qui coulait lentement le long de sa joue, ce qui en accéléra sa course, et, par chance en cachait sa tristesse apparente.
Yugo leva la tête et ouvrit sa main. Il en recueillit quelques gouttes qu’il montra à la jeune fille.

- La pluie... Par chez moi, on dit que ce sont les larmes des anges qui tombent pour effacer nos péchés…
- … Crois-tu qu’elles lavent mon… envie ? Murmura Yuko les yeux baissés.
- Si tu penses que c’est ton péché… Alors oui, elles t’en débarrassent.

Il accompagna sa phrase en approchant lentement la main de sa pommette, et fit glisser son index délicatement le long de la joue.
Yuko le regardait dans les yeux et elle décela une lueur tendre pour la première fois. En fin de compte, elle voyait son regard pour la première fois.
Ils étaient si proches. Il avait toujours sa main contre la joue de Yuko. Il approcha doucement son visage et Yuko ferma les yeux, sa bouche entrouverte laissant échapper un sanglot. Il lui murmura alors à son oreille :

- Je t’ai volé une larme… et je suis sûr qu’elle me sauvera de mon état…

Il ne se redressa pas pour regarder la jeune fille. Il continua son chemin laissant Yuko seule, tremblante et confuse.

- Bonne nuit petit ange, murmura-t-il.

Les paroles s’évanouirent. Lorsqu’elle se retourna, il était déjà parti. Ca ne pouvait être qu’une apparition, sa tête lui jouait des tours… Ah… Les courses ! Se souvint-elle.

~*~

- On a toutes nos broches ! Se réjouissait Kima.
- Mais on n’a pas détruit la source, l’arrêta Deshi. Je ne sais pas s’il faut se réjouir.
- Si ça se trouve ce n’était que des démons pour vous entraîner à passer le niveau supérieur, fit remarquer Satoshi.
- Satoshi… ce n’est pas un jeu vidéo, rétorqua gentiment Kasumi.

La porte claqua et Yuko apparu, les cheveux trempés. Elle posa les courses sur le bar à l’américaine et enlevait son manteau.

- Aaah ! On t’attendait ! L’accueillit Haneru. Takeshi va pouvoir nous préparer un bon festin.
- Tu es toute trempée Yuko ! Va te sécher les cheveux, tu vas attraper mal, lui conseilla Kima.
- Non merci… Je n’ai pas faim, je vais aller me coucher.

Kima se retourna dubitativement vers Haneru. Yuko était trop distraite à son goût, mais ne voyant pas le garçon inquiet, elle se retourna à son tour.

- Bon alors, Satoshi, comment tu as fait pour te déclarer à Kasumi ? Reprit-elle pour changer de sujet ?

Après de nombreuses excuses confuses, de replacement de situation et de sujet, Kasumi réussit à dire qu’il ne s’était pas déclaré, mais qu’il l’avait juste invitée au bal. Satoshi, quant à lui s’était levé pour aider Takeshi à préparer la cuisine, bien que le jeune homme n’ait pas besoin de son aide.

- Eh bien… Je n’aurai jamais pensé qu’il… prenne au sérieux ma demande, avoua Kasumi.
- Je comprends plus, là… C’est lequel des deux qui a demandé ? L’interrompit Deshi.
- Chut ! Laisse-la s’expliquer, l’arrêta Denchu.
- Oui, euh… donc, en fait, il m’avait dit que Fumio voulait m’inviter au bal et que c’était pour cette raison qu’il se devait de m’accompagner, pour éviter que je m’affiche avec… comment il a dit, déjà… ah oui, que je m’affiche avec un blaireau !
- Il est gonflé ! Même en première, on en entend parler de celui-là ! Il est plutôt grande gueule, non ? Se demandait Kima.
- Oui, plutôt populaire. Mais timide malgré tout. Apparemment… enfin, selon Satoshi, il lui aurait demandé de l’aide pour qu’il sorte avec moi.
- Noooon ?!! L’interrompit encore une fois Deshi. Mais c’est génial ça ! Enfin non… pas pour Satoshi.
- Bref, tout à l’heure, en cours, il a posé… non, jeté un paquet sur ma table. Il se tenait de biais, les mains dans les poches, comme ça, mimait Kasumi. Et il m’a demandé que je sois sa cavalière pour le bal. Oh, c’était pas une demande des plus fines, mais il n’a pas eu peur de le faire devant tout le monde.
- Hin hin… C’est une incitation pour ne pas que tu refuses, ça. Toi au moins, tu aurais eu la délicatesse de ne pas refuser, tu ne l’aurais pas laissé dans une situation embarrassante, répliqua Denchu.
- Tu crois ça ? Insinua Deshi à voix basse, se rappelant des piques de colère de la rouquine. Et Fumio… il était là ?
- Oui, à deux tables devant. Bouche bée. Enfin bon, j’ai accepté.
- Vu que tu ne pouvais pas faire autrement… Continua Denchu.
- Et il y avait quoi dans le paquet ? Demandait Deshi
- Une belle robe bleu pastel ! Je ne l’ai pas encore essayée, répondit Kasumi.
- Tu l’as ouvert tout de suite ? Reprit Denchu.
- Oui, tel que je le connais, il ne m’aurait pas lâché tant que je n’avais pas ouvert le paquet.
- Et les autres filles ? S’enquit Kima.
- Littéralement parlant : sur le cul ! Répondit Kasumi, avec une pointe de fierté dans la voix.

Ses deux amies rirent de bon cœur et Kasumi jeta un coup d’œil en biais à Satoshi qui les regardait inquiet.
Leurs regards se croisèrent : il lui lança un clin d’œil en signe de reconnaissance et elle lui sourit en retour avant de baisser la tête et se retourner auprès de Kima, Denchu et Deshi qui discutaient du vêtement approprié pour la soirée.

~*~

Yuko était sortie, loin du tumulte de la pension. Et plus elle s’éloignait, plus l’obscurité et le silence l’enveloppaient, si bien qu’elle ne sentait même plus son corps.
Elle se sentait attirée par quelque chose, elle savait qu’elle devait aller de l’avant.

Il était là, et lui tournait le dos, mais avant qu’elle n’ait pu le rejoindre, il venait de disparaître dans un nuage obscur.
Sa disparition lui fit comprendre son environnement. Hostile, froid… Pourtant, jusqu’à présent, elle ne ressentait pas l’air comprimé et pesant qui l’enveloppait. Elle voulait partir, retourner d’où elle venait.
Alors qu’elle reculait tout en gardant en ligne de mire l’endroit où Yugo était quelque instants auparavant, elle sentit cette chaleur qu’elle avait perdue, et butta contre quelqu’un.

- Alors, on s’est perdue… ?

Yuko se retourna discrètement. Le jeune homme était derrière elle. Il écarta une mèche qui barrait le visage de Yuko et la porta à sa bouche.
Elle n’arrivait pas à se tourner complètement. Elle était comme figée.

- Maintenant que tu n’es plus égarée, petit chaton, je vais pouvoir y aller…
- NON, ATTENDS !

Il avait commencé à se dégager, mais elle retint sa main et l’amena près de son cœur. Ca me fait du bien quand tu es là… Il se rapprocha, déplia ses bras pour enlacer la jeune fille et rapprocha délicatement son visage pour l’embrasser tendrement.

Le décor changea subitement. Ils étaient au milieu des bois et une cascade d’eau noire et bouillonnante coulait non loin. Elle s’était transformée sans même s’en rendre compte, Yugo lui faisait face, un sourire carnassier aux lèvres.

- C’était donc ça ta plus grande peur… Que ton pouvoir soit reprit par le plus offrant…

Sa voix avait changé. Elle s’était dédoublée : se mélangeait avec sa voix grave une voix fluette. Ce n’était pas Yugo, et la voix féminine qu’il portait, elle la connaissait.
Ses vêtements se changèrent devant elle. Un long manteau lui recouvrait les épaules et ses pupilles se firent verticales, comme celle d’un serpent. Elle se dégagea vivement et commença à invoquer une sphère maléfique, mais elle n’apparaissait pas.
Le démon l’attrapa par le col, et toujours superposé par la voix féminine, il lança :

- Tu veux me tuer ?! Tu ne peux plus rien maintenant, j’ai ton pouvoir… regarde !

Il la poussa violemment et fit apparaître les sphères de Dark dans ses poings. La Soldier accusa le coup sans avoir le temps de riposter. La sphère l’envoya valdinguer contre un rocher et sa main effleura la cascade. Au contact, l’eau rongea sa peau comme de l’acide.
Elle eut à peine la force de hurler sa douleur tellement elle était faible. Un filet de sang commençait à couler d’entre ses lèvres.

- Ne t’en fais pas… J’en ferai bon usage !

Deux grandes ailes noires se déployèrent de son dos. Il puisait toute sa force dans le pouvoir de Dark et l’essayait à loisir.

Toujours à terre, Dark ressentait à nouveau la présence de ce froid, de cette obscurité. Un environnement pourtant familier qui semblait la rejeter…
De sa main valide, elle brassa cet air sombre qui venait docilement à elle et la transformait avec précaution. Elle se releva difficilement, et Yugo, pensant sûrement qu’il n’avait plus rien à craindre d’elle, s’en éloigna sans se soucier de son état. Et plus il s’éloignait, plus elle retrouvait force.

- JE NE TE LAISSERAI PAS FAIRE ! JE NE TE LAISSERAI PLUS M’APPROCHER !!

Elle déversa toute l’énergie qu’elle avait amassée et Yugo n’eut pas le temps d’éviter la vague d’antimatière qui déferla sur lui.
De son corps fut expulsé une femme. Dark la reconnut aussitôt : il s’agissait de Nanako.

L’antimatière continuait son travail destructeur sur sa proie et elle se consuma lentement, dans un cri assourdissant. Les ailes disparurent, l’enveloppe charnelle de Yugo, son corps et sa tête. Il ne restait plus rien.

~*~

Yuko sursauta. Le rêve qu’elle venait de faire lui avait paru tellement réel. Lorsqu’elle prit le temps de parcourir la pièce de ses yeux, elle vit tous ses amis près d’elle, Kima les deux mains en l’air comme pour s’innocenter d’un délit.

- Que… Qu’est-ce…

Elle avait du mal à s’exprimer, son souffle était saccadé.

- Tu as hurlé dans ton rêve… enfin, cauchemar, lui répondit Kima. J’ai voulu t’apaiser, tu paraissais en transe, possédée.
- Et… du sang coulait de ta bouche, poursuivit Haneru.

Yuko porta aussitôt sa main à sa bouche. Lorsqu’elle regarda plus attentivement, elle remarqua non seulement le sang, mais aussi la brûlure sur sa main.

- Ce n’était pas qu’un simple rêve… Réussit-elle à dire après avoir repris son calme. J’ai tué… quelque chose… quelqu’un.
- Qui ? Lui demanda Toya.
- Une fille, en seconde qui tournait autour de… Elle s’arrêta, ne voulant pas le mêler à cette histoire. Il s’agissait de Nanako.
- On en parlera demain… Tu es épuisée ! L’arrêta Haneru. Je préfèrerais que tu reprennes ton calme. Je resterai dans la chambre pour te veiller en cas de problèmes, ok ?
- Merci… Lui murmura Yuko.
- C’est normal ! Et puis, ça me rappellera l’époque où tu voulais absolument dormir avec moi, pour éviter que les monstres ne viennent…
- Merci… Le coupa-t-elle, avec un agacement perceptible.

La voyant à nouveau bougon, le petit groupe se rassura sur son état et commença à repartir. Takeshi referma la porte derrière lui, et…

« CRAAAC !! »

- Mais c’est pas vrai !! Les poignées de portes, PUT…réfaction !!! S’emporta Deshi.
- Ben… pourtant… se confondit Takeshi. Eh ! Attends !

Il s’approcha près de la commode des escaliers, passa sa main dessous et souleva sans difficulté la table pourtant lourde de nombreuses encyclopédies.

- J’AI RETROUVE MON POUVOIR ! J’AI RETROUVE MON POUVOIR !! S’exclamait celui-ci.
- Maintenant que tu le dis, je commence à retrouver mon mal de tête habituel… Reprit Toya.

Il retira son T-Shirt et se tourna vers Deshi en plissant les yeux…

- Ah ah ! C’est à ça que tu penses ?!
- DE… ? Répondit la jeune fille, plus qu’embarrassée. Mais attends, tu ne peux pas lire dans l’esprit des Soldiers ! Reprit-elle pour se donner plus de contenance.
- Non, je ne peux pas lire dans votre esprit, mais je peux ressentir vos émotions ! AH AAAAH ! MOI AUSSI, J’AI RETROUVE MON POUVOIR !!

Toya et Takeshi se laissèrent aller dans une sorte de danse de la joie, et personne ne se souvenait avoir vu Toya en pareil état. Ils furent néanmoins coupés par la voix mélodieuse de Yuko :

- ET MOI AVEC VOS CONNERIES, JE NE RETROUVERAI JAMAIS MON SOMMEIL !!

1- 2- 3- 4- 5- 6- 7- 8- 9- 10- 11- 12- 13- 14- 15- 16- 17- 18- 19- 20