Fanfiction
- Hors série « Contes de Sélénia » |
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1- Contes populaires
Voici ce que nous rapportent les anciens, présents avant la malédiction qui nous soumirent aux volontés des dieux tyranniques...
De ces temps, deux mondes coexistaient sans se mélanger : le monde des fées, régulatrices des flux naturels, et le monde humain, détenteurs du savoir et travailleurs acharnés.
Entre ces deux mondes existaient des passerelles : des temples, protégés par des gardiens mi-humains, mi-sauvages.Ces temples étaient à la fois la force et la faiblesse du monde magique : chacun renfermait le pouvoir d’un élément et l’accès au pays des fées puisant dans cet élément pour régner sur les forces de la nature.
Les temples, construits par des pierres stellaires et soumis à de puissantes incantations, répondaient directement de la Lune : lorsque celle-ci était pleine, le temple disposait de sa pleine puissance. Nouvelle, le temple ne disposait d’aucune protection et tout un chacun pouvait y pénétrer et dérober le pouvoir sacré.
Bien que cachés par les fées, dans des endroits inextricables où les chemins étaient inexistants ou impraticables, les fées, ne connaissant que trop bien l’avidité et la convoitise humaine, conclurent un pacte avec les humains : elles acceptèrent de réguler le monde afin que nul malheur n’advienne à leur espèce, en échange de quoi ceux-ci devaient leur remettre à chaque génération, un gardien qui protégerait au péril de sa vie le terrible savoir magique qu’il détenait.Aussi, concernant les gardiens, il est dit que les bébés naissant avec une tâche particulière, non sans rappeler certains tatouages rituels, étaient les élus et possédaient le don animus ou malédiction de métamorphose les nuits de nouvelle lune, où transformés en bête féroce, ceux-ci devenaient dangereux pour leurs congénères.
Ces gardiens, dont la simple évocation terrifiait les peuples et entrainaient le bannissement à la femme qui en enfantait, étaient précipités dans des puits dès leur plus jeune âge par les druides des villages en guise de sacrifice.
Bien que l’histoire ait déformé leurs propos et que leurs agissements étaient immodérés, les fées récupéraient ces petits êtres, les nommaient et les élevaient dans leur pays pendant six années, puis les envoyaient dans les temples où ils ne purent jamais retrouver compagnie.
Ils ne manquaient ni de nourriture, car les fées leur en apportaient pendant leur sommeil, ni de chaleur, car les temples reproduisaient la température du ventre humain… De fait, ils ne manquaient que d’amour et de sociabilisation, et c’est ce qui valut la perte de nos deux mondes.Mais je vais bien trop vite dans notre histoire. Pour clore sur les lois dictées par les fées pour la protection de leurs temples, j’ajouterai ceci : lorsque la lune était pleine et que la protection entre les mondes se suffisait à elle-même, les gardiens avaient la possibilité de s’éloigner du temple, et se mêler aux humains.
Sachez que les gardiens naissent tous la même année et viennent remplacer la génération précédente, alors libérée de toutes contraintes et pouvant définitivement choisir la forme qui leur plaisait le mieux. Rarement nous avons été témoin du retour d’un gardien : ceux-ci de par leur caractère sauvage et solitaire, préféraient retourner au sein du règne animal.
L’histoire du monde que nous connaissons aujourd’hui, celle des dieux qui terrorisent nos contrées, est liée aux agissements des gardiens. Laissez-moi vous décrire ceux-ci alors qu’ils étaient sous la bénédiction des fées…
Koori est né sur l’île de Shachi à la mi mars, et son tatouage ne fut pas découvert par les femmes qui s’occupaient de faire sa toilette. Bien entendu, à chaque naissance, l’inspection était minutieuse, mais la minuscule larme qui ornait son pied fut prise pour un bleu. Ce n’est que lorsque la jeune mère lingea son enfant qu’elle remarqua que l’hématome supposé s’était étendu et avait une finesse dans les contours qui ne trompait pas.
Etant son premier enfant, un gaillard bien portant et aux traits fins, elle hésita longuement entre le cacher ou le remettre au druide et aux prêtresses, mais la peur conditionnée prit le dessus et relativisa son geste en se persuadant qu’elle était jeune et qu’elle n’aurait aucun mal à avoir un second enfant bien portant… si ce n’est qu’elle avait oublié que les femmes étaient bannies et marquées afin que nul village ne puisse les accueillir, les condamnant à une vie de hors la loi et de solitude.
L’on nous a apporté que sa forme animale était celle d’un orque et qu’il défendait le temple des fées aquatiques.Raijin eut la chance de naître en octobre sur la péninsule de Washi, là où les gens prêtent peu d’attention aux pratiques religieuses.
Sa mère fut étonnée de lui voir un tatouage sur l’omoplate gauche, mais elle n’y prêta guère attention aux premiers mois de sa vie.
Ce fut lors de son baptême, alors que l’on fit appel à un prêtre du village voisin, prêtre qui défendait fermement les pratiques ancestrales, que celui-ci conjura le sort de l’enfant ainsi que celui de ses parents sans grand ménagement.
Selon les dires, Raijin a la capacité de se transformer en aigle la nuit venue, afin de surveiller le temple des fées aériennes.Koori et Raijin sont les gardiens dont nous disposons le plus d’éléments concernant leur naissance. Voici ce que nous savons des autres gardiens, mais ce ne sont que des rumeurs rapportées de village en village, et sûrement déformées…
Oniwa serait né pendant un rude hiver en janvier dans les montagnes Kuma, d’une mère ayant déjà accouché de cinq enfants. Ce sixième enfant était celui de trop.
Déjà affaiblie par ses cinq précédentes couches, elle ne survécut à ce dernier enfant, un grand gaillard qui avait puisé toute l’énergie de sa mère pour naître.
Lorsque son père remarqua le tatouage sur le deltoïde droit, il n’eut aucun mal à le livrer au druide du village car l’enfant était responsable de la mort de sa bien-aimée et le garder signifiait une bouche de plus à nourrir.
Sa mission était de combattre quiconque s’approchait du temple des fées de la roche sous les traits d’un ours brun.Shisako, quant à lui, serait né dans les brumes de la vallée Ookami en plein mois de mars. Ce sont des chasseurs habitant près de la forêt Sasori qui l’ont trouvé là, dans les bras de sa jeune mère morte. L’avenir du garçon ne faisait aucun doute au vu du tatouage qui couvrait la moitié de son dos, en partant des omoplates.
Ils eurent néanmoins un doute en se penchant sur la jeune mère, au visage marqué de symboles ésotériques, et qui avait pour seul habit une longue toge élimée. Ils ne surent jamais de quelle contrée elle provenait et s’accordèrent sur le fait que les tatouages étaient bien trop grossiers pour que sa tribu ait pu en marquer le dos du garçon, et personne ne revendiqua être le père de l’enfant qui fut aussitôt précipité dans le puits sacré.
Plus tard, cette vallée brumeuse fut hantée par les hurlements d’un lycanthrope, et l’on raconte qu’il s’agissait du jeune Shisaku, protecteur des fées de l’esprit.L’on conte que Toraku connut un sort moins cruel : il vit le jour dans le désert du Biakko, sous le soleil ardent du mois de juillet. Son tatouage gravé sur sa nuque ne laissa aucun doute aux parents qui le déposèrent au pied de la hutte du druide du village dans le plus grand anonymat. Après un long chemin vers le puits sacré le plus proche, le druide l’abandonna à l’intérieur, non sans avoir psalmodié les incantations pour le sauver du triste sort auquel il était soumis et le prier de protéger la tribu d’où il était né afin qu’il n’attire pas le mauvais œil à cause de leur geste.
A ce que vous pouvez deviner, les paroles du druide ne furent entendues…
Toraku prendrait la forme d’un tigre pour empêcher quiconque de pénétrer dans l’illustre temple des fées du feu.Dokusou lui, aurait vu le jour dans la jungle d’Hebi pendant la clémence du mois de septembre. Son tatouage fut immédiatement repéré car il s’étendait au dessus de sa poitrine et ses parents se résignèrent à abandonner leur enfant au druide du village. Cependant, alors que la jeune femme était contrainte au bannissement, son mari décida de partir avec elle.
La forme connue de Dokusou était celle d’un serpent venimeux. Il avait pour mission de protéger le temple des fées de la nature.Enfin, Kinzoku aurait été délaissé quelque part dans la forêt Sasori au mois de décembre. Ses parents, ayant vu le tatouage qui cernait l’envers de son poignet droit l’abandonnèrent sans mal afin de ne pas s’attirer les foudres de leur village. On ne sait pas combien de temps il resta ainsi, sans nourriture ni couverture… Ce fut un druide qui recueillit l’enfant miraculé, et le précipita dans le puits réservé aux gardiens.
Sa résistance à cette épreuve est sûrement due à sa forme animale, celle du scorpion, usée pour garder les portes du temple des fées des armes et du métal.Cette génération de gardien remplissait si bien leur rôle que nous n’entendions aucune nouvelle d’eux, ne les voyions que très rarement mêlés à la foule les jours de pleine lune… Mais vint cet instant funeste où ils décidèrent d’activer en même temps les temples un jour de nouvelle lune, alors que le pouvoir des fées était au plus faible, et de prendre leur pouvoir afin de devenir les dieux que nous connaissons.
Comment ils eurent cette idée, nous ne le sûmes plus tard, mais ce qu’il en résulta fut bien pire que ce que nous pûmes jusqu’alors imaginer : nos deux mondes se mélangèrent. Pouvoir et Savoir se rencontrèrent, magie et non-magie se côtoyèrent, et le Yin et le Yang, le cœur et la matrice de notre Sélénia furent réveillés.L’énergie Yin, que nous connaissons mieux sous le nom de Kurao prit la tête des armées du Savoir et combattit le Pouvoir qui était trop velléitaire, donc néfaste à son goût. Les fées furent décimées, et seulement une poignée d’entre elles survécurent et se cachèrent dans bien des lieux, se mêlant aux humains et agissant en simples humaines, travaillant la terre, prenant éducation lorsqu’elles le purent et mari afin de passer inaperçues et limiter le génocide dont elles étaient témoins, si bien que nous perdîmes toutes traces d’elles, ne sachant réellement si elles existent encore, ou ont réellement existé.
Quant à l’action du Yang, nous ne savons toujours pas ce qu’il est advenu, s’il se cache, s’il fuit ou s’il prépare sa défense pour reprendre sa place… Kurao et les nouveaux dieux tyranniques ont eut tôt fait de le renverser afin de laisser aucune chance au monde de rétablir l’équilibre originel.
Voilà tout ce que je peux vous apprendre. Je terminerai par une dernière remarque : ouvrez l’œil mais restez discrets, car sur les fées qui se cachent de ce champ meurtrier repose l’espérance du changement.
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