Fanfiction
- 4ème Saison « Rien ne va plus » |
1- 2- 3- 4- 5- 6- 7- 8- 9- 10- 11- 12
8- La passion dévorante d'une rose noire
Un coup de fouet claqua dans l’air. Un avertissement. Dark Flower Soldier arborait le sourire des bourreaux sadiques, accentué par son regard vert émeraude, irréel. Elle était de ceux qui aimaient faire souffrir et qui aimaient voir souffrir. Flower se détacha de la surface froide et lisse du dôme et s’engagea dans la clairière, encerclant à pas mesuré son double maléfique, étudiant la portée du fouet, recherchant un point d’attaque…
En ayant observé le combat entre Dark Mini Soldier et Mini, elle s’était rendue compte que le clone n’avait aucune habilité à la maîtrise d’un élément. Alors elle l’aurait par la distance.Derrière le dôme, elle n’entendait pas les Soldiers s’agiter, tout comme eux n’entendaient aucun bruit leur parvenir de l’intérieur.
Iron avait demandé à Earth de creuser une tranchée. Le séisme qu’il avait provoqué avait défiguré le chemin de terre et la cavité s’était arrêtée nette à la base du dôme. Earth se tourna l’air désolé vers Iron qui ne prit pas la peine de répondre à son regard : il s’acharnait à creuser à la base à coup d’épée, tentant de créer un tunnel… mais le dôme était en réalité une sphère bien implantée dans le sol. Alors Iron lâcha son épée et retomba lourdement sur le sol, abattu. Il se tourna vers les Soldiers, l’air hagard et plaida :- Dites-moi qu’elle va s’en sortir…
Mais personne n’osa avancer telle promesse.
~*~
Flower lançait sa première attaque : une pluie de feuille coupante comme l’acier se déversa sur son ennemie. Avec son fouet, Dark Flower avait balayé la majorité des projectiles, seules certains réussirent à passer, qu’elle évita sans peine en effectuant de nombreux flips.
- Te baisser aurait suffit ! Lança Flower, irritée.
- Je sais ! Claironna sa rivale. Mais je voulais simplement te montrer ce dont j’étais capable !
- Je sais en faire autant que toi ! S’était-elle enhardie.
- Alors que la meilleure gagne !Dark Flower s’élança à toute vitesse vers Flower, qui se précipita aussitôt vers un arbre qu’elle avait repéré : en bordure de la clairière, celui-ci avait des branches basses, presque nues et parfaites pour monter sur les supérieures, et pour rejoindre les sapins qui le suivaient.
Elle s’élevait avec souplesse et agilité, sautant d’une branche vers une autre, peu ralentie par les petites branches qui semblaient n’opposer aucune résistance lorsque Flower souhaitait passer car les arbres lui facilitaient son avancée.
De son côté, Dark Flower regardait sa rivale se frayer son chemin et ne s’en trouvait que plus amusée. Un rapide coup d’œil vers les Soldiers pour s’assurer qu’ils ne manquaient rien du spectacle lui donna un excès de sadisme : Iron était littéralement collé au dôme, les mains écartées et crispées comme s’il souhaitait le déplacer. Les autres, à court d’idée pour détruire la barrière de protection avaient des attitudes opposées : Earth était aux côtés de Haneru et regardait la scène avec un visage fermé, Psy avait les yeux fermés : il se concentrait et ses lèvres bougeaient à toute vitesse, quant aux deux dernières blondes, elles étaient aux côté de Ocean. La rouquine était à genou, le visage dans ses mains, Deshi la soutenait et Thunder tenait Mini dans ses bras… Un beau tableau suintant le drame.
Dark Flower se voulut d’humeur joueuse et participative. Aussi, elle fit claquer son fouet sur le dôme qui se fissura sous le choc, et les Soldiers s’activèrent à nouveau, pris d’un regain d’espoir pour tenter de détruire la surface de verre… sans résultat.- Ha, ha, ha, ha !!! Tes amis ressemblent à des papillons de nuit attirés par la lumière : ils s’excitent dès qu’ils croient voir un espoir se profiler ! Allez, redescends, maintenant ou je viens te chercher… et ça, ça va vraiment m’ennuyer…
Les Soldiers se figèrent… Ils l’avaient entendue. Cette fissure laissait passer le son.
La sombre plante avait jeté un coup d’œil en direction de ses ennemis. Un sourire en coin étira sa bouche, puis elle se retourna auprès des arbres où évoluait Flower et se dirigea vers ceux-ci d’un pas décidé, en faisant tourner son fouet tel un lasso. Face à elle se tenaient les impressionnants conifères, qui semblaient trembler en sa présence. D’un coup, elle fut arrêtée dans son avancée par une pluie de feuilles et d’épines provenant de l’endroit où Flower se tenait : les arbres avaient perdu une partie de leur feuillage ce qui aurait pu découvrir la Soldier et la laisser à la merci de son double maléfique, mais après s’être essuyée le visage, blessée par la pluie d’aiguilles vertes, Dark Flower n’avait plus son assaillante à vue.
Un rapide balayage de la scène et elle la repéra, longeant le dôme à toute allure. D’un coup de fouet à terre, les épines se soulevèrent et d’un autre claquement horizontal, elle les envoya droit sur Flower.Flower vit le coup venir et se para elle aussi de son fouet épineux qui n’arrêta qu’une partie des épines cependant…
- PARTEZ TOUS !!! ALLEZ-VOUS-EN !!
Tout en courant, elle tapait sur le dôme en hurlant en direction des Soldiers qui restaient prostrés et partagés sur l’issue du combat. Flower ne voulait pas qu’ils la voient perdre, elle voulait leur épargner cette peine… et elle redoutait surtout que ne vienne le tour d’un autre Soldier après le sien. Il fallait qu’ils rentrent à la pension. Il en allait de leur vie.
Mais à s’occuper de ses amis, Flower ne vit pas le nouveau coup de fouet de la Dark qui lui lacéra le visage. Ce coup la fit trébucher lourdement. Si tu crois que tu vas en tirer avantage, chère Erzatz, tu te trompes lourdement !
Alors que Dark Flower avançait pour donner son coup de grâce, Flower crispa ses mains sur le sol meuble, les enfonçant profondément à en labourer la terre, et de nombreuses racines en surgirent, se tordant tels des tentacules de poulpe à la recherche d’une proie. Les racines emprisonnèrent les pieds de Dark Flower, laissant à Flower le temps de se relever et d’invoquer ses lianes tranchantes…
Cependant, la démone fut la plus rapide : elle venait d’enserrer la gorge de Flower de son fouet et tirait de plus en plus fort afin de la voir étouffer, mais cette mort lente ne plut pas à Dark Flower car tant que sa rivale ne trépassait pas, les racines continueraient à lui déchirer les jambes… il fallait donc en finir vite.- Tu as de la chance… je n’ai pas envie de souffrir, donc tu mourras vite !
Dark Flower tira par à-coup ses bras à elle, afin de faire chanceler sa proie, puis elle entama un mouvement de rotation, entraînant Flower selon sa volonté, telle une marionnette. La jeune fille se cognait à la paroi du dôme, puis elle trébucha à nouveau avant de se sentir soulevée dans les airs et projetée avec violence vers les arbres… Elle sentit alors les branches se coincer dans ses cheveux, lui arracher ses vêtements, ses boucles d’oreilles, se planter dans sa peau et la griffer avec violence… Je ne vais pas mourir, je ne vais pas mourir, je ne vais pas mourir…
- Je ne vais pas mourir, JE NE VEUX PAS… MOURIR !!
Puis elle entendit un bruit sourd.
Son dos avait heurté un tronc d’arbre. Sa folle course s’était arrêtée et le fouet s’était aussitôt délié de son cou.
Elle tenta de s’enfuir pour se cacher, le temps de trouver une parade, mais ses jambes ne répondaient pas… tout comme elle ne sentait plus ses mains. N-non…
Une vive lueur verte se dégagea d’elle, emportant les restes et l’essence de Flower. Son cristal s’empressait de trouver réceptacle et s’enfuyait vers la seule personne capable de lui donner refuge : Nithael.- Tu viens de m’offrir une belle métaphore, Kima… La nature s’est retournée contre toi, et m’a choisie !
Au contact du cristal, Dark Flower se volatilisa et la même déflagration silencieuse se produisit : le dôme explosa en multiples éclats scintillants qui disparaissaient avant de tomber sur le sol… laissant aux Soldiers la vision de Kima, crucifiée sur l’arbre, une branche traversant grossièrement son ventre…
Kima suffoquait. L'oxygène déjà ne circulait plus. Elle ne voulait pas regarder ce qui lui déchirait les entrailles et venait de tuer sur le champ ses espoirs de fonder une famille. Les larmes de souffrance qui voilaient ses yeux l'empêchaient de distinguer clairement qui s'avançait près d'elle... mais elle n'avait pas besoin de ses yeux pour le savoir.
Iron titubait. Main tendue, il souhaitait atteindre Kima, la toucher, l'embrasser, l'entendre respirer...
Tout cela n’était pas réel. Ca ne pouvait pas être. Ses yeux le trompaient, il allait se réveiller et au matin tout serait comme avant : il regarderait Kima dormir à ses côtés et provoquerait la mauvaise humeur de sa sœur lorsqu’il lui ébourifferait les cheveux pendant le petit déjeuner…
D’ailleurs, il se déplaçait aussi difficilement que dans ses cauchemars… avec un mauvais pressentiment, l'impression de ne pas y arriver, ou d'arriver trop tard. A de nombreuses reprises il vacilla lorsque ses pieds s'emmêlaient dans les nids-de-poule formés par le combat. A mesure qu'il arrivait près d'elle, Kima se décomposait en poussière d'étoile.- Désolée… je ne peux plus t’attendre…
Ils n'avaient même pas eu le temps de se dire adieu...
Pourtant, sur les derniers mètres, Haneru avait couru tout son soûl, et peu lui importait de trébucher, il désirait juste la toucher une dernière fois… mais tout ce qu’il put avoir fut les dernières poussières d’étoiles qui vinrent lui frôler la main.Alors il tomba à genou devant l’arbre, tête baissée, bras ballants, paume ouverte vers le ciel, des larmes coulèrent le long de ses joues en un flot qu’il ne pouvait contrôler, puis il leva la tête vers la branche qui retenait Kima quelques instants auparavant. Le regard rageur, il porta ses mains à sa ceinture, en tira son épée qui accrocha un rare éclat de lumière, pour couper d’un coup sec ce bout de bois de la mort et trancher avec autant de facilité le tronc qui tomba à la renverse dans un bruit assourdissant.
Haletant, il regarda son œuvre avec dégoût, puis, d’un coup d’estoc, il plongea sa lame dans le sol et offrit ce geste pour Kima… pour son sépulcre.De loin, les Soldiers, les larmes aux yeux, joignirent de concert leurs mains, afin de prier ensemble pour le salut de l’âme de leur amie.
Devant eux, la forêt n’avait plus rien de reconnaissable. Elle semblait avoir été ravagée, comme dévastée après le passage d’une tempête… Elle pleurait elle aussi la mort de leur gardienne.~*~
Je venais de perdre deux amies qui m'étaient chères.
Jusque là, notre mission comportait des pertes mais la joie était vite retrouvée sans que nous nous en sentions coupables. Parfois, la mélancolie faisait surface, mais nous étions tous présents pour la surpasser.
Je venais de perdre deux sœurs.
Comme si l'on m'avait arraché une partie de moi-même, et même Mini qui était venue dans mes bras ne pouvait apaiser cette sourde souffrance. Ajoutée à cette douleur venait ma tristesse pour Iron. Lui venait de perdre une sœur qu'il avait à peine retrouvé, une amie et amante... voire plus. C'était douloureux de le voir ainsi terrassé, de voir qu’il ne pouvait tenir debout sans l'aide de Psy et Earth. Sa dernière force, il l'avait fournie pour donner une digne sépulture à celle qu'il n'avait pu sauver. Je ne sais plus qui l’a écrit, mais il avait vu juste : « un homme peut se résoudre à l’idée de perdre la vie, mais pas à l’absence de ceux qu’il aime ».
Les questions viendraient après, les mensonges aux familles aussi. Tout ce qui nous importait à présent, c'était de quitter ces bois maudits, non pas parce que nous avions peur pour nous-mêmes, mais parce que nous avions peur pour nos compagnons de combat, pour nos amis.
Je ne me souviens plus du voyage retour, seulement de la luminosité. Il faisait très sombre dans ces bois. Il devait être plus de cinq heures du soir car la nuit était tombée, et le réverbère de la pension était allumé. C’est ce qui m’indiqua que nous étions bien arrivés, mais je ne peux pas parler de « soulagement ».
Personne ne s’attarda dans le salon. Psy et Earth déposèrent Haneru dans sa chambre et s’en furent sans bruit dans la leur. Il avait été si affaibli qu’il s’était détransformé sur le chemin et avait perdu connaissance.
Aucun échange n’avait été prononcé. Avec Yumi dans les bras, j’étais restée dans la chambre de Kima et Haneru, qui semblait déjà grande sans mon amie, et n’avais pas pris conscience que tout le monde s’était retiré. Peut-être par respect, pour le laisser seul, ou par peur de ne pas savoir quoi faire. Il tremblait, les yeux fermés… il semblait en transe. J’avais peur de le laisser ainsi… ou peut-être avais-je peur de rester seule. Aussi, je m’activais près d’Haneru. J’étais partie lui chercher un gant d’eau froide que j’appliquais sur son front brulant, ce n’était pas grand-chose, mais j’espérais que cela le soulagerait.Pendant que je m’affairais, j’avais placé Yumi sur le lit à côté de Haneru.
Maintenant que j’y pense, je n’avais pas conscience de profiter de Yumi… Elle ne bronchait pas, pourtant, je me l’accaparais réellement pour chasser mes pensées angoissantes et apaiser Haneru. Elle qui avait également été la victime d’une attaque et le témoin d’un meurtre… elle qui n’avait que cinq ans, comment pouvais-je l’obliger à rester près de moi au lieu de l’emmener se coucher ? Moi qui depuis toujours pensais la protéger, c’était finalement elle qui veillait sur moi. Comment ai-je pu passer à côté de ses ressentis…?~*~
Le regard inquiet mais amère, Denchu était sur le perron à observer la forêt qui entourait la pension. Les ennemis les avaient attaqués dans cette densité verte, mais qui les empêcherait de venir jusqu’ici ? Qui plus est, l’une d’elle est déjà venue jusqu’à la pension…
Perdue dans ses sombres pensées, elle n’avait pas vu arriver Takeshi à ses côtés. Elle se rendit compte de sa présence lorsqu’il couvrit ses épaules d’une épaisse couette.- Tu vas attraper froid à rester là… Lui fit-il remarquer
- J’ai peur de rester à la pension et qu’il se passe quelque chose dehors…
- Tu ne risques rien à la pension, le champ d’action leur serait trop restreint, et on est tous présents.
- Peu importe, je veux être prête !
- Denchu… Tu n’as pas à gagner ou à tout le temps te battre… Veille juste à ne pas être blessée… S’il-te-plaît, ne les cherche pas.
- … Tu crois qu’on va tous y passer ? Demanda-t-elle, absente.Takeshi éluda sa question. Il souleva un pan de la couette et vint la serrer dans ses bras. Denchu accueillit ses bras avec soulagement et se reposa entièrement contre lui.
Le menton sur la tête de la jeune fille, Takeshi scruta lui aussi la forêt, et raffermit son étreinte tout en refermant la couette sur eux, afin que l’air froid ne puisse s’y faufiler.
Ils restèrent longtemps ainsi, puis Denchu se fit plus lourde et Takeshi comprit qu’elle s’était endormie. Il se releva et hésita à la porter à son lit car il souhaitait rester avec elle… Alors il s’assit délicatement sur le perron et se cala dans un coin où le vent ne pouvait les atteindre. Il déplia les jambes de Denchu et l’installa près de lui en reposant bien la couette sur son corps, mais instinctivement, Denchu ramena les jambes et se recroquevilla au plus près de Takeshi, en enfouissant son visage dans le torse du jeune homme. Ils restèrent la nuit ainsi, à dormir dans les bras l’un de l’autre.~*~
A mesure que les jours passaient, les conifères, seuls arbres à survivre à l’hiver, perdaient leurs épines, comme s’ils n’étaient plus solidaires du sol… comme s’ils étaient déracinés. Le temps aussi s’était dégradé en trois jours. Il faisait de plus en plus sombre…
Les Soldiers évitaient désormais le plus possible le cœur de la forêt et restaient le plus souvent en groupe s’ils devaient sortir. Le reste du temps, ils restaient à la pension, afin de soigner Haneru qui gardait toujours le lit.Une nuit, Toya fit un rêve qui le tira du sommeil. Il avait rêvé de Deshi, de son visage joyeux dont les traits se modifièrent du tout au tout. Ses yeux s’étaient écarquillés face à la stupéfaction, puis se plissèrent sous la douleur. Deshi était tombée à terre et ne se releva pas. Il n’avait rien pu faire.
Ce rêve avait été des plus tangibles qu’il ait faits jusqu’à présent. Rien n’était venu brouiller les détails. La scène semblait s’être déroulée sous ses yeux l’instant d’avant. Quand était-il en train de rêver, finalement ? Sa chambre, plongée dans la pénombre semblait aussi réelle que son cauchemar. N’y tenant plus, il se leva et gagna la chambre de Deshi et Denchu et commença à paniquer : Denchu était bien dans son lit, à dormir profondément, mais son amie n’occupait pas le lit d’à côté. Il recula, ayant toujours la chambre à vue, puis s’engouffra dans le couloir pour atteindre les escaliers qui menait au rez-de-chaussée mais fut stoppé dans son égarement par un malencontreux heurt… humide.
Après avoir bousculé la personne qui remontait les escaliers, Toya reçut le contenu d’une bouteille d’eau en plein visage…- HAAAA !
- Chut, Deshi, tu vas réveiller tout le monde !
- Toya ? Oh, pardon, mais tu m’as surprise ! Je n’ai pas l’habitude que les gens soient debout à trois heures du matin…
- Qu’est ce que tu étais partie faire ?
- Chercher une bouteille d’eau… Je t’ai réveillé ?
- Indirectement, oui.Deshi étouffa un rire, le premier depuis trois jours, et entreprit d’essuyer le visage mouillé de Toya avec la manche de son pyjama. Mais il arrêta son geste et lui prit ses bras pour les passer autour de son cou et la serrer tout contre lui.
- Dors avec moi…
- Euh… je…
- Juste dormir. Ne pas te savoir à mes côtés m’angoisse. J’ai rêvé que je te perdais, et j’ai vraiment pris peur en voyant que tu n’étais pas dans ton lit.Deshi acquiesça silencieusement et cala son visage au creux de la nuque de Toya. Elle se laissa porter jusqu’à la chambre de Toya et tous deux s’endormirent en un rien de temps grâce à leur présence respective et rassurante.
~*~
Toya avait offert une bague à Deshi le lendemain. Cette bague avait appartenu à sa mère et accompagnait merveilleusement bien le bracelet qu’il lui avait offert auparavant. Takeshi et Denchu ne se quittaient plus. Ils passaient le plus clair de leur temps à être ensemble, à se pelotonner dans le canapé pour suivre une série télé, à travailler ensemble… pendant que moi je me sentais responsable d’Haneru. L’esprit ainsi occupé, je ne pensais pas au reste.
Je savais aussi que Toya retrouverait chaque soir Deshi afin qu’elle l’apaise de son sommeil agité. Moi, je n’avais pas cette chance, ou tout du moins, j’avais la chance d’avoir un sommeil réparateur grâce à Yumi, mais je ne pouvais trouver le réconfort auprès de Satoshi. J’avais le pressentiment, pourtant, que les jours de tous étaient comptés, et rien ne me décidait, ni ne le décidait à franchir le pas. En y pensant, quelle attente égoïste… je ne pouvais supporter d’être la seule à ne pas avoir de bras pour me protéger et me consoler. Si j’avais pu m’y réfugier, je suis certaine que la perte de mes amis aurait été moins dure à supporter. Oui, vraiment, j’étais une personne égoïste : je ne pensais qu’à ma propre douleur en ces nuits de solitude…~*~
Cinq jours étaient déjà passés depuis la disparition de Yuko et de Kima. Aucun Soldier ne voulait parler de mort, et repoussait d’autant l’annonce à leurs parents. Ils n’avaient d’ailleurs réfléchi à aucune excuse.
Deshi en était à ce point de réflexion, lorsqu’elle se rendit compte qu’elle était de corvée de course et qu’il n’y avait plus rien à manger. Cependant, elle fut soulagée des nouvelles règles de sécurité mises en place, précisant que personne ne devait sortir seul en dehors de la pension. Elle demanda donc à Denchu de l’accompagner jusqu’à la superette pour y acheter le nécessaire.
Les deux jeunes filles s’étaient couvertes pour affronter le froid qu’il faisait dehors. Cela faisait bien quatre jours qu’elles n’étaient pas sorties : la chaleur accablante de la pension les avait habituées à vivre avec vingt degré de plus, et elles eurent toutes deux un frisson lorsqu’une première brise glaciale vint les surprendre.
Elles marchèrent en silence, chacune se concentrant sur ses pensées, sans prêter attention à leur environnement. Deshi, faisant tourner machinalement sa bague, se souvint de la raison de la présence de Denchu, et de cette routine pour observer plus attentivement l’environnement. Elle remarqua alors quelque chose d’étrange : les arbres lui semblaient morts. Elle décida alors de sortir Denchu de ses réflexions pour lui faire part des siennes :- Tu as vu… les arbres ?
- Oui… Ils ressemblent à de vulgaires bouts de bois mort.
- Et ils pourrissent… Tu crois que... que Kima avait un effet bénéfique sur eux ?
- Je ne sais pas. Si c’est le cas, on court à notre perte.Deshi marqua un temps d’arrêt à la phrase de son amie. Il est vrai que la production d’oxygène par les arbres est très importante pour l’homme, tout comme l’est le plancton végétal dans les océans. Elle n’avait jamais envisagé les Soldiers comme des éléments clés de l’écosystème. Maintenant qu’elle s’en rappelait, lorsqu’Hitomi les avait fait plonger dans son passé, leur vie antérieure, les souverains avaient fait mention de leur perte lorsque les petits monarques étaient morts… et c’était aussi pour cela qu’ils s’étaient sacrifiés pour redonner vie à une nouvelle planète.
Deshi revint au présent et lança un regard en direction du bois mort où elle aperçut une fumée en sortir. En humant l’air, elle sentit clairement l’odeur de bois brûlé, et la menace de voir le feu se propager au travers cette forêt de bois mort, parfait pour une combustion rapide…- Denchu ! Il y a le feu dans la forêt !! S’exclama-t-elle, alarmée.
- Non, n’y va pas, c’est trop dangereux !
- Ca le sera encore plus si on laisse le feu s’étendre ! La pension est entourée par la forêt ! Je contrôle le feu, je pourrai le réduire si j’y vais maintenant.
- Attends, tu ne veux pas qu’on demande à Ocean et aux autres de nous aider ? L’arrêta Denchu.
- Non, on n’a pas le temps. Viens, on se transforme toutes les deux au cas où et on reste côte à côte. On ne risquera rien !Denchu acquiesça et les deux amies se transformèrent. Elles traversèrent la forêt à toute vitesse en suivant la fumée, pour remonter à son origine.
Déjà trois arbres brulaient et menaçaient d’en incendier un quatrième qui ouvrirait une course folle au feu pour qu’il contamine tout un pan de la forêt où les arbres étaient étroitement liés.
Thunder s’était arrêtée un peu avant Fire car la chaleur lui était insupportable. Son amie, quant à elle, était aux pieds des arbres, et par un mouvement circulaire des bras, elle enjoignait aux langues de feu de rester sur les arbres déjà calcinés. Thunder conjuguait son pouvoir à celui de son ami : elle bloquait le vent qui pouvait attiser les flammes.
Et fort heureusement, il s’amenuisait déjà. Ce n’était plus qu’une question de minutes et le feu aurait dévoré tout le combustible disponible, ne laissant que du charbon.
Les arbres rougeoyants par la braise n’étaient plus une menace, et les deux jeunes filles purent souffler un instant. Fire se recula doucement et elle eut raison de ce geste : une branche encore chaude vint s’écraser sur le sol recouvert d’épines de sapins, et l’air de la chute attisa les cendres, provoquant le départ d’un nouveau feu. Fire en délimita l’étendue aussitôt et tapa du pied sur les flammes naissantes :- C’est bon, on va pouvoir y aller ! Lança-t-elle joyeusement à Thunder.
Mais elle avait parlé trop vite : des flammes, une main en surgit, attrapant le pied de Fire et la projetant au plus loin.
En se levant sur les coudes, elle s’aperçut que le feu avait repris, et épousait les formes d’une femme qui s’en dégagea aussitôt. Fire se releva aussitôt pour lui faire face avec Thunder mais la silhouette claqua des mains et Thunder fut automatiquement écartée de la scène de combat, comme repoussée par un mur invisible.
Lorsque la progression du mur cessa sa course, Thunder, toujours appuyée contre le dôme, vit son amie se tourner vers elle et put lire sur ses lèvres un « va-t-en… », dernier ordre, dernière requête de son amie, avant que la fumée noire n’emplisse le dôme, la cachant de Fire qui s’en était retournée à son assaillante.Au milieu de toute la fumée, Fire apercevait deux yeux rouges comme la braise. Plissant les yeux dans cette chaude obscurité, la Soldier engagea le combat : elle lança de flammèches en direction des yeux rieurs, et la fumée s’éclipsa un instant, le temps de voir son double maléfique. Sa peau pâle prenait les reflets orangés du feu qui l’entourait, et son sourire carnassier laissait apparaître deux longues canines. Ses cheveux rouge étaient criards, tout comme ses lèvres. Elle avait tout d’une vamp, quoiqu’un tantinet plus vulgaire puisqu’elle n’affichait aucune retenue.
- Bien, maintenant que tu m’as découverte, je me présente : je suis Haaïah Hoko, ton…
- … Ange gardien, alias Dark Fire Soldier, j’ai saisi le concept…
- Mmmmh, tu ne feras pas ta maligne bien longtemps…
- Si j’ai bien compris, je n’ai que mes mots pour te blesser.
- Fini les digressions, voyons ce que t’as dans le ventre !
- Je n’attends que ça…Dark Fire avait claqué sa main dans l’air d’un coup sec. Fire n’entrevit pas directement quel avait été le coup porté, mais lorsqu’elle vit luire deux points dorés se diriger vers elle, semblables à de l’or, elle plongea aussitôt sur le côté, et les shurikens se plantèrent à l’endroit où Fire était quelques secondes auparavant.
Fire étouffa un rire et jeta deux boules de feu en direction de son clone qui les évita sans mal :- La précision n’a jamais été ton fort, Fire ! Lança Dark Fire.
- Certes, cependant, mon feu fera bien plus de dégâts que tes Bo Shuriken… Tout le monde sait que cette arme n’est utilisée que pour distraire un adversaire…
- C’est ce qu’on verra !Dark Fire prit son élan et s’éleva dans les arbres qui n’étaient pas encore calcinés. Fire tenta de la suivre, mais une pluie d’étoiles l’en dissuada. Plusieurs Shurikens l’atteignirent, lui déchirant le visage, lui entaillant bras et jambes…
- Je te rappelle que tu es mon opposée et je connais tes mouvements... je connais donc tes faiblesses mieux que quiconque ! La narguait Dark Fire en multipliant le nombre de ses assauts.
Fire plongeait et roulait sans arrêt pour éviter les lancer. Elle commençait à manquer d’oxygène et ses yeux étaient douloureusement irrités. Avisant un renfoncement, elle y plongea afin d’y trouver un peu de fraicheur et d’oxygène nécessaire à sa survie.
Protégée un instant par ce qui avait sans doute jadis servit de tanière à un renard, elle tenta une dernière fois de percer du regard le cercle de fumée afin de voir si Thunder avait suivi son conseil et était rentrée, mais elle ne put le constater tant la fumée était épaisse.
Fire se risqua donc à sortir, mais deux étoiles vinrent la surprendre. Qu’à cela ne tienne : de la tanière, elle avait une vision parfaite des troncs où se tenait Dark Fire. Ainsi, elle puisa dans toute son énergie disponible et fit couler une lave incandescente jusqu’à la base des arbres qui prirent feu instantanément.
Une dernière pluie d’étoile vint se planter à la base de la tanière dans un geste désespéré, et fut aussitôt suivie d’un cri déchirant où la douleur semblait émaner de tous les pores de la peau de son double.
Fire sortit de sa cachette. Un instant, elle se demanda si elle avait volé cette victoire, mais cette pensée fut remplacée aussitôt par un profond sentiment de justice vengeresse à l’égard de ses amies. Elle admirait le rideau de feu d’où elle pouvait voir Dark Fire tenter des assauts désespérés, et se convulser tel un ver retenu par une épingle…Alors, la voyant tomber et ne plus se relever, Fire lui tourna le dos et s’en retourna au chemin forestier qui la mènerait à la pension. Elle essuya son visage et regarda son gant sali de sueur, de suie, de terre et de sang.
A mesure qu’elle avançait, la fumée se désépaississait. Et elle put les voir : tout le groupe l’attendait, inquiet. Prise d’un regain d’énergie, elle accourut vers eux, un sourire de soulagement pouvait se lire sur son visage, mais à quelques mètres du groupe, elle ralentit le pas… Pourquoi restaient-ils là, le visage crispé ? Pourquoi n’avançaient-ils pas pour aller à son encontre… comme collés à une paroi de verre invisible… ?
Alors Fire affaissa ses épaules et leur adressa un triste sourire avant de se retourner à son mur de feu et de disparaître à nouveau dans le nuage de fumée noire.