Fanfiction
- 2ème Saison « Résurection » |
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Renaissance
La
chambre d’hôpital, baignée de la douce lueur de l’aube
était aussi figée qu’un tableau.
La respiration de Deshi était à peine perceptible et les draps
ne laissaient apparaître aucun pli.
L’infirmière, qui passait au moment où les Soldiers voulurent
entrer, laissa échapper une expression de mécontentement et demanda
à ce qu’il n’y ait uniquement que deux personnes par visite
maximum.
Kasumi toussa faiblement et décida d’entrer. Yuko, derrière
elle, n’avait pas levé la tête de tout le trajet et décida
enfin de couper court aux profondes pensées qui l’assaillaient.
Elle regarda un instant Kasumi qui l’attendait puis se décida à
entrer dans la chambre où reposait la jeune fille dont elle avait privé
l’âme.
Après avoir passé le seuil de la porte, Kasumi se colla au mur
et laissa Yuko près de Deshi.
La jeune fille aux cheveux noirs regarda longtemps celle aux yeux bandés
et lui passa la main sur son visage pour en extraire le mal. De sa poche intérieure,
elle sortit une sphère anciennement liée à son sceptre
en tant que réserve d’énergie dont les parois internes ne
cessaient de s’agiter, la posa sur le cœur de Deshi puis passa sa
main au travers de cette boule.
La lueur de la sphère s’était affaiblie jusqu’à
en disparaître. Yuko avait transféré l’âme de
Deshi de cette sphère à son cœur en fantomisant sa main pour
pénétrer le cristal sans la blesser.
La jeune fille s’éveilla brutalement et repris son inspiration
comme si elle avait passé trop de temps sous l’eau sans respirer.
Les moniteurs s’étaient affolés face à la hausse
de tension brutale puis avaient repris un rythme plus doux lorsqu’elle
s’était calmée.
La main posée sur son cœur, Deshi reprenait son souffle. Elle dirigea
ensuite ses mains sur sa tête et en délia précipitamment
les bandes.
La lumière était beaucoup trop vive et elle fut obligée
de plisser les yeux. Elle comprenait maintenant ce que ressentait Takeshi qui
rencontrait constamment une lumière trop vive pour ses yeux fragiles.
Peu à peu ses yeux s’habituèrent à la clarté
de la pièce, puis elle tourna machinalement la tête vers sa droite
et vit Yuko. Elle n’avait pas senti sa présence, mais ce n’était
pas ça qui l’effrayait. Deshi reconnaissait son agresseur.
Prise de
panique, elle commença à s’écarter de la jeune fille
qui la fixait sans laisser passer aucune émotion. Seulement, Deshi n’avait
pas évalué la distance qui la séparait d’une chute
inévitable et elle tomba à la renverse, entraînant avec
elle les draps et le vase posé sur sa table de nuit auquel elle avait
tenté de se raccrocher.
Outre les bruits de bris de verre, les moniteurs, détachés de
tout battements vitaux, émirent un bruit strident, signifiant l’absence
de vie dans le corps sur lequel ils étaient reliés.
Tous ces bruits alarmèrent les Soldiers qui se précipitèrent
dans la chambre où ils retrouvèrent Yuko, toujours assise auprès
du lit, face aux pieds de Deshi et Kasumi ayant contourné toute cette
pagaille pour la rassurer :
- Attends, Deshi, laisse-moi t’expliquer, tu vas comprendre. Yuko ne te fera pas de mal !
~*~
Toute cette pagaille n’avertit pas seulement le groupe d’amis, mais aussi l’infirmière, affolée du bruit anormal des moniteurs. En pénétrant dans la chambre, son affolement fit place à un étonnement, puis à une colère ascendante.
- Mais… Mais qu’est-ce que c’est que ce bazar ?! Demanda-t-elle au groupe attroupé et bruyant, commentant la chute de la jeune fille. OOH ! JE VOUS PARLE !
La deuxième phrase de l’infirmière cloua le bec à tout le monde, intrigué de la venue de celle-ci.
- J’avais
dit pas plus de deux personnes ! Reprit-elle sur le même ton indigné.
- … Elle est réveillée maintenant, lui répondit Toya
de la manière la plus douce qu’il soit, comme s’il expliquait
à un enfant en bas âge que le Père Noël n’existait
pas.
- Prenez-moi pour une idiote, maintenant ! Je vois bien qu’elle est réveillée,
et elle a besoin de repos, lui répliqua-t-elle en écartant tout
le monde et en s’approchant de la jeune fille à terre pour lui
rebrancher les moniteurs.
Encore peu
consciente de la situation, Deshi, toujours sur le dos, s’appuya sur ses
coudes, retira ses pieds du lit qui lui conféraient une position inconfortable
et se leva sans prêter attention aux efforts que faisait l’infirmière
pour lui rebrancher les moniteurs. Puis, gênée par les fils qui
l’empêchaient d’avancer, la jeune fille défit une à
une les électrodes qui la liait aux machines éteintes par Toya
à cause du son strident qu’elles émettaient.
Face à ce manque de discernement, l’infirmière abandonna
toute tentative de rebranchement puis sortit de la chambre, encore plus agacée
que d’accoutumée.
Une fois tous les fils débranchés, Deshi lissa le pyjama de l’hôpital
pour paraître plus respectable :
- Bon, et
bien… Bonjour, leur dit-elle
- Bonjour Dou, bien dormi ! Lui répondit Yumi qui lui avait sauté
au cou.
- Elle… parle ? Elle parle ! Mais je suis restée combien de temps
ici ?! S’alarma la jeune fille en regardant l’assemblée comptant
un membre de plus en la personne de Yuko.
- Plus ou moins deux jours, lui répondit Takeshi.
- Deux jours pour tout ce changement ? Et… et mes parents ?! Vous leur
avez dit quoi ?
- Pas au courant, répondit Toya.
Deshi, toujours aussi étonnée laissa son regard errer dans le vide, puis Denchu s’approcha de son amie et la serra dans ses bras. Tous imitèrent la jeune fille pour accueillir leur petite revenante. Tous sauf Yuko qui n’avait toujours pas bougé.
- Si la situation
ne s’était pas arrangée aujourd’hui, on aurait prévenu
tes parents lui répondit Denchu, le regard fatigué et le visage
marqué par quelques blessures. Par contre, je ne sais pas ce qu’on
leur aurait dit.
- Vous êtes tous blessés ! Qu’est-ce qu’il vous est
arrivé ? S’inquiéta-t-elle.
- On t’expliquera ça au calme à la maison. Là, je
crois qu’on a eu notre compte d’émotions pour la journée,
et il serait sage qu’on aille se reposer l’esprit et le corps, répondit
son amie.
Haneru, un peu à l’écart salua cette nouvelle de loin. De très loin. Il était certes heureux que Deshi se soit réveillé, et l’avait lui aussi étreint, mais il ne pouvait s’empêcher de penser à la bataille qui lui avait anéanti de nombreux espoirs et qui avait ébranlé ses certitudes.
~*~
Deux jours après la visite mouvementée de ses amis, Deshi, sortie de l’hôpital, avait été informée de ce qu’il s’était passé pendant son absence de quatre jours :
- Après
que Dark t’ait pris ton âme, nous avons voulu combattre l’ennemi,
et c’est là que nous nous sommes rendus scompte que Kaho était
revenue. C’est elle qui a tout orchestré depuis le début.
On ne pouvait pas l’attaquer car elle était protégée
par l’ancien lien qui unissait deux personnes opposées sur Sélénia.
Le lien de vie et de mort, lui résuma Toya.
- Le lien… Mais s’il a été rompu, ça veut dire
que…
- Il faut que tu saches que… qu’Hitomi nous a sauvés, dit
Haneru, ne laissant pas Deshi terminer sa phrase.
- Mais… mais Hitomi, où est-elle ?! S’inquiétait la
jeune fille.
Yuko avait baissé les yeux. Et Haneru n’ayant tenu compte du malaise du groupe énonça les faits avec une pointe d’aigreur. Il lui raconta comment le combat s’était déroulé et comment ils furent impuissants face à Kaho et à Dark. Il lui raconta comment Hitomi avait empêché Dark de le tuer, puis marquant une courte pause, il lui expliqua comment Yumi, ou plutôt Mini, avait réussi à ramener Yuko qui terrassa à jamais Kaho.
- Je suis sûr qu’Hitomi connaissait son destin, ainsi que le rôle de Mini et celui de Dark dans cette bataille. C’était une mission suicide pour elle et elle n’a pas hésité.
Deshi restait abasourdie par ce qu’elle venait d’entendre. Elle jeta un coup d’œil hésitant vers Yuko qui gardait les yeux rivés sur ses genoux.
- Et tes
parents… Ils sont au courant du retour de Yuko ? Risqua-t-elle.
- Non. Et je ne veux pas avoir à les confronter. Je leur dirai quoi à
ton avis ? Lui répondit soudainement Yuko de sa voix grave.
- … Mais il faut qu’ils sachent ! S’exclama Deshi après
un cours instant, le temps de se concentrer sur cette voix qu’elle n’avait
encore jamais entendu. Ils seraient…
- Ils seraient quoi ? Heureux ? Ils se sont faits à l’idée
de ne plus jamais me voir. Ils ne m’auront pas vu grandir et je serai
une parfaite inconnue, répliqua-t-elle aussi sèchement avant de
se lever pour quitter la maison.
Les Soldiers regardèrent Yuko partir devant eux, et Kasumi voulut tenter quelque chose, mais elle ne trouva courage que devant son frère :
- Mais…
Pourquoi s’est-elle braquée…? Haneru, tu n’es pas d’accord
avec ce que dit Deshi ?
- Je ne sais pas… Je ne sais plus. Elle est tellement différente
de la Yuko que j’ai connu. Pourtant, il n’y a aucun doute, c’est
bien ma sœur, et même si pour le moment je n’arrive pas à
l’extérioriser, je suis content qu’elle soit parmi nous et
que vous l’ayez acceptée.
Ni Kasumi,
ni les autres n’insistèrent sur les parents d’Haneru et de
Yuko. Cela viendrait naturellement et il était vrai que c’était
encore trop tôt pour aborder le sujet.
Il se faisait tard et la journée ayant été mouvementée,
chacun décida d’aller se coucher – Deshi traînant un
peu des pieds vu qu’elle s’était reposée depuis deux
jours, mais elle avait tellement envie de parler à Denchu de tout ce
qu’il venait de se passer – et la salle se vidait petit à
petit, laissant Haneru seul.
- Tu ne vas
pas te coucher ? Lui demanda Kima qui elle aussi s’apprêtait à
monter les escaliers.
- Non. J’attends Yuko. Je rejoindrai la chambre dans pas longtemps.
- … Tu… Je ne veux pas que tu te sentes responsable, je ne veux
pas que tu ailles mal à cause de ce qu’il s’est passé,
lui répondit-elle en s’approchant.
- Comment veux-tu qu’il en soit autrement ? Je ne peux m’empêcher
de penser… qu’elle est morte à cause de moi.
- Tu sais, tant que l’on pense à une personne, elle ne meurt jamais
alors pense à elle et pas à ton chagrin, réussit à
dire Kima avec un léger sourire.
Haneru plongea ses yeux bleus dans ceux de Kima, ce qui la fit rougir, puis lui rendit son sourire.
- J’attends quand même Yuko, j’aimerai qu’elle voit qu’il y aura toujours quelqu’un pour l’attendre, et qu’elle se sente… chez elle.
~*~
Les jours passaient et se ressemblaient. Deshi voulut rendre un dernier hommage à Hitomi et Kima se proposa de l’accompagner au temple. Sur le chemin, les deux jeunes filles étaient silencieuses, aucune des deux n’osant troubler ce calme. Ce n’est qu’arrivées face au Tori que Kima brisa le silence
- Je peux
te poser une question ?
- Tu veux savoir si la nourriture de l’hôpital était bonne
?
- Non, non, sourit la jeune fille. C’est plus délicat… Je
voulais savoir, ce qu’il s’est produit lorsque tu as sombré
dans le coma. Qu’est-ce que tu as « vu » ?
- Rien. C’est juste au moment où Dark a pris mon âme que
j’ai senti que je quittais mon corps et qu’on m’enfermait
ailleurs. J’ai ressenti une forme d’emprisonnement, je n’ai
aucune autre forme de souvenirs… Du moins, je crois.
A l’entrée
du temple, un mot était affiché à l’attention des
citadins : « Chers fidèles, je regrette vous annoncer mon départ
de cette manière, cependant le devoir m’appelle auprès d’une
population défavorisée dans les hauteurs, où le calme et
la spiritualité règnent. J’espère avoir été
d’une aide bénéfique auprès de vous et je suis persuadée
que mon homologue poursuivra l’éducation que j’ai pu vous
apporter ». Par cette lettre d’adieu – en réalité
signée de la main de Denchu et exposée le lendemain de leur visite
à l’hôpital auprès de Deshi – les Soldiers,
voulaient éviter de préciser des détails qui n’apporteraient
aucune explication, si ce n’est qu’une totale incompréhension
et un attristement général.
Pour honorer la mémoire de la prêtresse, ils avaient mis en place
un autel sur lequel ils pouvaient se recueillir et laisser les habitants déposer
leurs messages d’encouragement qui seraient envoyés à Hitomi…
Les deux jeunes filles s’étaient arrêtées près
de la stèle érigée au milieu de la cour, face au chêne
centenaire. Deshi, l’air grave regardait la tombe et ne savait que penser.
Tout s’était déroulé si vite et elle n’acceptait
pas encore cette perte si soudaine. Elle était si persuadée qu’Hitomi
réapparaîtrait derrière elles… Malheureusement, ce
furent les sanglots de Kima qui la ramena à la réalité.
- Je lui en ai voulu…
Deshi ne savait quoi lui dire, mais Kima ne lui en tint pas compte et continua son récit. Elle avait besoin de se confier, de se libérer de son fardeau.
- Elle, si
naturelle, si présente et aimante. J’en ai été jalouse
! S’indignait-elle.
- Tu… les sentiments ne se contrôlent pas. Tu n’as pas à
t’en vouloir.
- La jalousie… un sentiments si bas, si méprisable… Alors…
alors qu’Hitomi a sacrifié sa vie pour sauver Haneru ! Le don de
soi ! Dis-moi… dis-moi quelle preuve d’amour serait suffisamment
grande pour l’égaler ?!
- Rester à mes côtés.
- Haneru ?! S’exclama Kima en se retournant, ses yeux retenant encore
ses larmes de couler.
Haneru franchissait les dernières marches qui le séparaient de la cour et Deshi décida de s’éloigner discrètement après avoir gratifié un sourire encourageant à Kima. Elle s’était suffisamment recueillie et savait qu’elle pourrait retourner dans ce temple à un moment plus opportun. Elle avait transmis à Hitomi ses dernières pensées et l’avait surtout remerciée de tout ce qu’elle avait fait jusque là. La portée de ses actions bénéfiques – Deshi le savait – ne s’éteindraient pas avec elle, mais se poursuivrait de génération en génération.
- Tu veux
une preuve ? Je ne saurai lesquelles choisir… Tu as toujours été
là, réconfortante, ne tenant pas compte de mes excès. Je
n’ai remarqué que très tard l’intérêt
que tu me portais.
- … Mais tu aimais Hitomi, lui répondit-elle, amère.
Haneru s’approcha de la jeune fille qui avait baissé la tête en prononçant la phrase qu’elle n’aurait jamais voulu s’avouer et la serra délicatement dans ses bras en enfouissant sa tête dans la nuque de la jeune fille, mais elle le repoussa.
- Arrête… Tu fais toujours des beaux discours, mais ce ne sont que des paroles. Tu as dis la même chose à Hitomi. Je vous ai entendu.
Haneru eut un mouvement de recul, puis il pris la tête de Kima entre ses deux mains et la força à le regarder dans les yeux.
- Alors c’est
pour ça ? Kima, j’étais sincère envers Hitomi, mais
elle a cerné la situation mieux que moi… Comme d’habitude.
Elle m’a dis que je me méprenais. Que je choisissais la facilité
pour ne pas avoir à encaisser une blessure plus profonde. Lorsqu’il
n’y a que la surface qui est touchée, on s’en remet facilement,
mais si la coupure est plus profonde, il reste des cicatrices et il est parfois
dur de s’en remettre.
- Je dois en déduire quoi ? Demanda Kima en se détournant du regard
profond du jeune homme.
Haneru se tourna vers l’autel, s’avança pour y poser sa main dessus et ferma les yeux en prononçant son ultime discours auprès de la prêtresse.
- Hitomi, j’ai enfin compris ce que tu me disais, mais ça ne valait pas ta perte. Il n’y a que toi qui la pensait indispensable. L’amour que je portais pour toi était celui d’un petit frère cherchant la protection d’une grande sœur… Tu étais celle vers qui j’ai pu me tourner lorsque ma petite sœur a disparu, et maintenant, Yuko est revenue.
Kima écoutait en silence les paroles d’Haneru. Elle aurait voulu le laisser se recueillir seul, mais quelque chose lui disait qu’il fallait qu’elle reste auprès de lui.
- Je voulais te dire de ne plus t’inquiéter pour moi. Car maintenant… Il y a Kima.
Puis il se retourna et regarda Kima dans les yeux.
- Tu resteras
avec moi ?
- Je… oui, bien sûr… Répondit-elle en détournant
son regard.
Le jeune homme se releva et marchait vers Kima
- Et si quelque chose te trouble, tu m’en parleras ?
Kima acquiesça en silence, puis elle croisa les bras comme pour retenir encore quelques instants ses sentiments qui voulaient s’exprimer à mesure qu’Haneru avançait. Arrivé à sa hauteur, il porta ses mains au visage de la jeune fille, qui, désorientée, décroisa ses mains pour les mettre par-dessus celle d’Haneru, puis il approcha délicatement son visage pour l’embrasser…
- Et est-ce
que tu m’aimeras comme je t’aime ?
- Haneru, j’attends ces mots depuis si longtemps… Mes sentiments
pour toi n’ont pas changé et ils ne changeront sans doute jamais.
~*~
Sur le chemin, Deshi croisa Yuko, assise sur un banc, encore peu habituée de sa présence, elle décida d’en apprendre un peu plus et s’assit à côté d’elle.
- Salut Yuko,
je ne te dérange pas ?
- Non, répondit-elle en s’écartant pour laisser à
Deshi la place de s’asseoir.
- Qu’est-ce que tu fais assise là toute seule ?
- Rien. Cet endroit m’apaise.
Deshi suivit
le regard de Yuko. De là ou elles étaient, on pouvait voir la
ville sous son aspect le plus calme. Bordée par les arbres, la ville
semblait enfouie sous un manteau de verdure, où seuls certains édifices
se mesuraient à la hauteur des centenaires.
Le temple, un peu plus loin sur la colline, se détachait clairement de
cet ensemble homogène.
- Tu…
tu allais souvent au temple petite, non ? Tenta-t-elle d’engager la conversation.
- Non. Je me souviens d’avoir été trop faible pour sortir.
On me laissait à la maison.
- Ah oui, c’est Haneru qui allait prier pour toi, se rappelait Deshi.
- Et rien n’y faisait. Personne ne voulait rien entendre là-haut
car j’étais toujours malade.
- Tu sais, il faut continuer à avoir foi car…
- Ah ! La religion… La religion ressemble au langage ou aux coutumes vestimentaires.
On se définit par rapport à l'éducation que l'on a reçue…
mais au final, je n’ai reçu aucune éducation. Je suis morte
lorsque Kaho m’a enlevée et voila que je renais avec autant de
souffrance, si ce n’est plus que lorsque j’étais enfant.
Quelle foi veux-tu que j’aie ? S’emporta Yuko en regardant intensément
Deshi.
- Je ne pense pas que la foi soit uniquement liée à la religion.
Avoir foi en soi, c’est le plus important.
- A quoi ça sert ? Pour pouvoir proclamer que la vie a un sens ? mais
en a-t-elle vraiment un ?
- Elle a le sens que tu lui donnes. Et à l’échelle humaine,
ça suffit amplement, répondit Deshi en se levant, marquant ainsi
la fin de la conversation. Bye, on se retrouve à la pension !
Deshi commençait à s’éloigner quand Yuko la rappela.
- Deshi !
- Oui ?
- Merci… de ne pas m’en vouloir.
- Oh, mais ce n’était pas vraiment toi. Par contre, je t’en
aurai voulu si j’étais restée aveugle, plaisanta la jeune
fille.
Yuko acquiesça sans sourire, et Deshi fut prise de compassion car elle sut que la sœur d’Haneru ne sourirait plus jamais.
~*~
Comprenant
la portée de la mission de la jeune prêtresse, la ville lui pardonna
vite, mais elle mit longtemps avant de choisir une autre prêtresse ayant
un réel don et une réelle générosité.
Ce fut d’ailleurs un jeune prêtre, Cristoba qui la remplaça.
Il paraissait bien plus vieux que son âge et ne se déplaçait
qu’avec une canne et son vieux chien miteux. Ses commentaires étaient
bien plus indéchiffrables – impénétrables dirons-nous
par la suite – que ceux d’Hitomi, aussi, il s’attira vite
la sympathie des habitants par ce côté extravagant qu’il
insufflait au temple.
Et jamais il ne vit d’un mauvais œil le recueillement des Soldiers
sur cet autel.
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