Fanfiction - 2ème Saison
« Résurection »

1- 2- 3- 4- 5- 6- 7- 8- 9- 10- 11- 12- 13- 14

Renaissance

La chambre d’hôpital, baignée de la douce lueur de l’aube était aussi figée qu’un tableau.
La respiration de Deshi était à peine perceptible et les draps ne laissaient apparaître aucun pli.
L’infirmière, qui passait au moment où les Soldiers voulurent entrer, laissa échapper une expression de mécontentement et demanda à ce qu’il n’y ait uniquement que deux personnes par visite maximum.
Kasumi toussa faiblement et décida d’entrer. Yuko, derrière elle, n’avait pas levé la tête de tout le trajet et décida enfin de couper court aux profondes pensées qui l’assaillaient. Elle regarda un instant Kasumi qui l’attendait puis se décida à entrer dans la chambre où reposait la jeune fille dont elle avait privé l’âme.
Après avoir passé le seuil de la porte, Kasumi se colla au mur et laissa Yuko près de Deshi.
La jeune fille aux cheveux noirs regarda longtemps celle aux yeux bandés et lui passa la main sur son visage pour en extraire le mal. De sa poche intérieure, elle sortit une sphère anciennement liée à son sceptre en tant que réserve d’énergie dont les parois internes ne cessaient de s’agiter, la posa sur le cœur de Deshi puis passa sa main au travers de cette boule.
La lueur de la sphère s’était affaiblie jusqu’à en disparaître. Yuko avait transféré l’âme de Deshi de cette sphère à son cœur en fantomisant sa main pour pénétrer le cristal sans la blesser.
La jeune fille s’éveilla brutalement et repris son inspiration comme si elle avait passé trop de temps sous l’eau sans respirer. Les moniteurs s’étaient affolés face à la hausse de tension brutale puis avaient repris un rythme plus doux lorsqu’elle s’était calmée.
La main posée sur son cœur, Deshi reprenait son souffle. Elle dirigea ensuite ses mains sur sa tête et en délia précipitamment les bandes.
La lumière était beaucoup trop vive et elle fut obligée de plisser les yeux. Elle comprenait maintenant ce que ressentait Takeshi qui rencontrait constamment une lumière trop vive pour ses yeux fragiles.
Peu à peu ses yeux s’habituèrent à la clarté de la pièce, puis elle tourna machinalement la tête vers sa droite et vit Yuko. Elle n’avait pas senti sa présence, mais ce n’était pas ça qui l’effrayait. Deshi reconnaissait son agresseur.

Prise de panique, elle commença à s’écarter de la jeune fille qui la fixait sans laisser passer aucune émotion. Seulement, Deshi n’avait pas évalué la distance qui la séparait d’une chute inévitable et elle tomba à la renverse, entraînant avec elle les draps et le vase posé sur sa table de nuit auquel elle avait tenté de se raccrocher.
Outre les bruits de bris de verre, les moniteurs, détachés de tout battements vitaux, émirent un bruit strident, signifiant l’absence de vie dans le corps sur lequel ils étaient reliés.
Tous ces bruits alarmèrent les Soldiers qui se précipitèrent dans la chambre où ils retrouvèrent Yuko, toujours assise auprès du lit, face aux pieds de Deshi et Kasumi ayant contourné toute cette pagaille pour la rassurer :

- Attends, Deshi, laisse-moi t’expliquer, tu vas comprendre. Yuko ne te fera pas de mal !

~*~

Toute cette pagaille n’avertit pas seulement le groupe d’amis, mais aussi l’infirmière, affolée du bruit anormal des moniteurs. En pénétrant dans la chambre, son affolement fit place à un étonnement, puis à une colère ascendante.

- Mais… Mais qu’est-ce que c’est que ce bazar ?! Demanda-t-elle au groupe attroupé et bruyant, commentant la chute de la jeune fille. OOH ! JE VOUS PARLE !

La deuxième phrase de l’infirmière cloua le bec à tout le monde, intrigué de la venue de celle-ci.

- J’avais dit pas plus de deux personnes ! Reprit-elle sur le même ton indigné.
- … Elle est réveillée maintenant, lui répondit Toya de la manière la plus douce qu’il soit, comme s’il expliquait à un enfant en bas âge que le Père Noël n’existait pas.
- Prenez-moi pour une idiote, maintenant ! Je vois bien qu’elle est réveillée, et elle a besoin de repos, lui répliqua-t-elle en écartant tout le monde et en s’approchant de la jeune fille à terre pour lui rebrancher les moniteurs.

Encore peu consciente de la situation, Deshi, toujours sur le dos, s’appuya sur ses coudes, retira ses pieds du lit qui lui conféraient une position inconfortable et se leva sans prêter attention aux efforts que faisait l’infirmière pour lui rebrancher les moniteurs. Puis, gênée par les fils qui l’empêchaient d’avancer, la jeune fille défit une à une les électrodes qui la liait aux machines éteintes par Toya à cause du son strident qu’elles émettaient.
Face à ce manque de discernement, l’infirmière abandonna toute tentative de rebranchement puis sortit de la chambre, encore plus agacée que d’accoutumée.
Une fois tous les fils débranchés, Deshi lissa le pyjama de l’hôpital pour paraître plus respectable :

- Bon, et bien… Bonjour, leur dit-elle
- Bonjour Dou, bien dormi ! Lui répondit Yumi qui lui avait sauté au cou.
- Elle… parle ? Elle parle ! Mais je suis restée combien de temps ici ?! S’alarma la jeune fille en regardant l’assemblée comptant un membre de plus en la personne de Yuko.
- Plus ou moins deux jours, lui répondit Takeshi.
- Deux jours pour tout ce changement ? Et… et mes parents ?! Vous leur avez dit quoi ?
- Pas au courant, répondit Toya.

Deshi, toujours aussi étonnée laissa son regard errer dans le vide, puis Denchu s’approcha de son amie et la serra dans ses bras. Tous imitèrent la jeune fille pour accueillir leur petite revenante. Tous sauf Yuko qui n’avait toujours pas bougé.

- Si la situation ne s’était pas arrangée aujourd’hui, on aurait prévenu tes parents lui répondit Denchu, le regard fatigué et le visage marqué par quelques blessures. Par contre, je ne sais pas ce qu’on leur aurait dit.
- Vous êtes tous blessés ! Qu’est-ce qu’il vous est arrivé ? S’inquiéta-t-elle.
- On t’expliquera ça au calme à la maison. Là, je crois qu’on a eu notre compte d’émotions pour la journée, et il serait sage qu’on aille se reposer l’esprit et le corps, répondit son amie.

Haneru, un peu à l’écart salua cette nouvelle de loin. De très loin. Il était certes heureux que Deshi se soit réveillé, et l’avait lui aussi étreint, mais il ne pouvait s’empêcher de penser à la bataille qui lui avait anéanti de nombreux espoirs et qui avait ébranlé ses certitudes.

~*~

Deux jours après la visite mouvementée de ses amis, Deshi, sortie de l’hôpital, avait été informée de ce qu’il s’était passé pendant son absence de quatre jours :

- Après que Dark t’ait pris ton âme, nous avons voulu combattre l’ennemi, et c’est là que nous nous sommes rendus scompte que Kaho était revenue. C’est elle qui a tout orchestré depuis le début. On ne pouvait pas l’attaquer car elle était protégée par l’ancien lien qui unissait deux personnes opposées sur Sélénia. Le lien de vie et de mort, lui résuma Toya.
- Le lien… Mais s’il a été rompu, ça veut dire que…
- Il faut que tu saches que… qu’Hitomi nous a sauvés, dit Haneru, ne laissant pas Deshi terminer sa phrase.
- Mais… mais Hitomi, où est-elle ?! S’inquiétait la jeune fille.

Yuko avait baissé les yeux. Et Haneru n’ayant tenu compte du malaise du groupe énonça les faits avec une pointe d’aigreur. Il lui raconta comment le combat s’était déroulé et comment ils furent impuissants face à Kaho et à Dark. Il lui raconta comment Hitomi avait empêché Dark de le tuer, puis marquant une courte pause, il lui expliqua comment Yumi, ou plutôt Mini, avait réussi à ramener Yuko qui terrassa à jamais Kaho.

- Je suis sûr qu’Hitomi connaissait son destin, ainsi que le rôle de Mini et celui de Dark dans cette bataille. C’était une mission suicide pour elle et elle n’a pas hésité.

Deshi restait abasourdie par ce qu’elle venait d’entendre. Elle jeta un coup d’œil hésitant vers Yuko qui gardait les yeux rivés sur ses genoux.

- Et tes parents… Ils sont au courant du retour de Yuko ? Risqua-t-elle.
- Non. Et je ne veux pas avoir à les confronter. Je leur dirai quoi à ton avis ? Lui répondit soudainement Yuko de sa voix grave.
- … Mais il faut qu’ils sachent ! S’exclama Deshi après un cours instant, le temps de se concentrer sur cette voix qu’elle n’avait encore jamais entendu. Ils seraient…
- Ils seraient quoi ? Heureux ? Ils se sont faits à l’idée de ne plus jamais me voir. Ils ne m’auront pas vu grandir et je serai une parfaite inconnue, répliqua-t-elle aussi sèchement avant de se lever pour quitter la maison.

Les Soldiers regardèrent Yuko partir devant eux, et Kasumi voulut tenter quelque chose, mais elle ne trouva courage que devant son frère :

- Mais… Pourquoi s’est-elle braquée…? Haneru, tu n’es pas d’accord avec ce que dit Deshi ?
- Je ne sais pas… Je ne sais plus. Elle est tellement différente de la Yuko que j’ai connu. Pourtant, il n’y a aucun doute, c’est bien ma sœur, et même si pour le moment je n’arrive pas à l’extérioriser, je suis content qu’elle soit parmi nous et que vous l’ayez acceptée.

Ni Kasumi, ni les autres n’insistèrent sur les parents d’Haneru et de Yuko. Cela viendrait naturellement et il était vrai que c’était encore trop tôt pour aborder le sujet.
Il se faisait tard et la journée ayant été mouvementée, chacun décida d’aller se coucher – Deshi traînant un peu des pieds vu qu’elle s’était reposée depuis deux jours, mais elle avait tellement envie de parler à Denchu de tout ce qu’il venait de se passer – et la salle se vidait petit à petit, laissant Haneru seul.

- Tu ne vas pas te coucher ? Lui demanda Kima qui elle aussi s’apprêtait à monter les escaliers.
- Non. J’attends Yuko. Je rejoindrai la chambre dans pas longtemps.
- … Tu… Je ne veux pas que tu te sentes responsable, je ne veux pas que tu ailles mal à cause de ce qu’il s’est passé, lui répondit-elle en s’approchant.
- Comment veux-tu qu’il en soit autrement ? Je ne peux m’empêcher de penser… qu’elle est morte à cause de moi.
- Tu sais, tant que l’on pense à une personne, elle ne meurt jamais alors pense à elle et pas à ton chagrin, réussit à dire Kima avec un léger sourire.

Haneru plongea ses yeux bleus dans ceux de Kima, ce qui la fit rougir, puis lui rendit son sourire.

- J’attends quand même Yuko, j’aimerai qu’elle voit qu’il y aura toujours quelqu’un pour l’attendre, et qu’elle se sente… chez elle.

~*~

Les jours passaient et se ressemblaient. Deshi voulut rendre un dernier hommage à Hitomi et Kima se proposa de l’accompagner au temple. Sur le chemin, les deux jeunes filles étaient silencieuses, aucune des deux n’osant troubler ce calme. Ce n’est qu’arrivées face au Tori que Kima brisa le silence

- Je peux te poser une question ?
- Tu veux savoir si la nourriture de l’hôpital était bonne ?
- Non, non, sourit la jeune fille. C’est plus délicat… Je voulais savoir, ce qu’il s’est produit lorsque tu as sombré dans le coma. Qu’est-ce que tu as « vu » ?
- Rien. C’est juste au moment où Dark a pris mon âme que j’ai senti que je quittais mon corps et qu’on m’enfermait ailleurs. J’ai ressenti une forme d’emprisonnement, je n’ai aucune autre forme de souvenirs… Du moins, je crois.

A l’entrée du temple, un mot était affiché à l’attention des citadins : « Chers fidèles, je regrette vous annoncer mon départ de cette manière, cependant le devoir m’appelle auprès d’une population défavorisée dans les hauteurs, où le calme et la spiritualité règnent. J’espère avoir été d’une aide bénéfique auprès de vous et je suis persuadée que mon homologue poursuivra l’éducation que j’ai pu vous apporter ». Par cette lettre d’adieu – en réalité signée de la main de Denchu et exposée le lendemain de leur visite à l’hôpital auprès de Deshi – les Soldiers, voulaient éviter de préciser des détails qui n’apporteraient aucune explication, si ce n’est qu’une totale incompréhension et un attristement général.
Pour honorer la mémoire de la prêtresse, ils avaient mis en place un autel sur lequel ils pouvaient se recueillir et laisser les habitants déposer leurs messages d’encouragement qui seraient envoyés à Hitomi…
Les deux jeunes filles s’étaient arrêtées près de la stèle érigée au milieu de la cour, face au chêne centenaire. Deshi, l’air grave regardait la tombe et ne savait que penser. Tout s’était déroulé si vite et elle n’acceptait pas encore cette perte si soudaine. Elle était si persuadée qu’Hitomi réapparaîtrait derrière elles… Malheureusement, ce furent les sanglots de Kima qui la ramena à la réalité.

- Je lui en ai voulu…

Deshi ne savait quoi lui dire, mais Kima ne lui en tint pas compte et continua son récit. Elle avait besoin de se confier, de se libérer de son fardeau.

- Elle, si naturelle, si présente et aimante. J’en ai été jalouse ! S’indignait-elle.
- Tu… les sentiments ne se contrôlent pas. Tu n’as pas à t’en vouloir.
- La jalousie… un sentiments si bas, si méprisable… Alors… alors qu’Hitomi a sacrifié sa vie pour sauver Haneru ! Le don de soi ! Dis-moi… dis-moi quelle preuve d’amour serait suffisamment grande pour l’égaler ?!
- Rester à mes côtés.
- Haneru ?! S’exclama Kima en se retournant, ses yeux retenant encore ses larmes de couler.

Haneru franchissait les dernières marches qui le séparaient de la cour et Deshi décida de s’éloigner discrètement après avoir gratifié un sourire encourageant à Kima. Elle s’était suffisamment recueillie et savait qu’elle pourrait retourner dans ce temple à un moment plus opportun. Elle avait transmis à Hitomi ses dernières pensées et l’avait surtout remerciée de tout ce qu’elle avait fait jusque là. La portée de ses actions bénéfiques – Deshi le savait – ne s’éteindraient pas avec elle, mais se poursuivrait de génération en génération.

- Tu veux une preuve ? Je ne saurai lesquelles choisir… Tu as toujours été là, réconfortante, ne tenant pas compte de mes excès. Je n’ai remarqué que très tard l’intérêt que tu me portais.
- … Mais tu aimais Hitomi, lui répondit-elle, amère.

Haneru s’approcha de la jeune fille qui avait baissé la tête en prononçant la phrase qu’elle n’aurait jamais voulu s’avouer et la serra délicatement dans ses bras en enfouissant sa tête dans la nuque de la jeune fille, mais elle le repoussa.

- Arrête… Tu fais toujours des beaux discours, mais ce ne sont que des paroles. Tu as dis la même chose à Hitomi. Je vous ai entendu.

Haneru eut un mouvement de recul, puis il pris la tête de Kima entre ses deux mains et la força à le regarder dans les yeux.

- Alors c’est pour ça ? Kima, j’étais sincère envers Hitomi, mais elle a cerné la situation mieux que moi… Comme d’habitude. Elle m’a dis que je me méprenais. Que je choisissais la facilité pour ne pas avoir à encaisser une blessure plus profonde. Lorsqu’il n’y a que la surface qui est touchée, on s’en remet facilement, mais si la coupure est plus profonde, il reste des cicatrices et il est parfois dur de s’en remettre.
- Je dois en déduire quoi ? Demanda Kima en se détournant du regard profond du jeune homme.

Haneru se tourna vers l’autel, s’avança pour y poser sa main dessus et ferma les yeux en prononçant son ultime discours auprès de la prêtresse.

- Hitomi, j’ai enfin compris ce que tu me disais, mais ça ne valait pas ta perte. Il n’y a que toi qui la pensait indispensable. L’amour que je portais pour toi était celui d’un petit frère cherchant la protection d’une grande sœur… Tu étais celle vers qui j’ai pu me tourner lorsque ma petite sœur a disparu, et maintenant, Yuko est revenue.

Kima écoutait en silence les paroles d’Haneru. Elle aurait voulu le laisser se recueillir seul, mais quelque chose lui disait qu’il fallait qu’elle reste auprès de lui.

- Je voulais te dire de ne plus t’inquiéter pour moi. Car maintenant… Il y a Kima.

Puis il se retourna et regarda Kima dans les yeux.

- Tu resteras avec moi ?
- Je… oui, bien sûr… Répondit-elle en détournant son regard.

Le jeune homme se releva et marchait vers Kima

- Et si quelque chose te trouble, tu m’en parleras ?

Kima acquiesça en silence, puis elle croisa les bras comme pour retenir encore quelques instants ses sentiments qui voulaient s’exprimer à mesure qu’Haneru avançait. Arrivé à sa hauteur, il porta ses mains au visage de la jeune fille, qui, désorientée, décroisa ses mains pour les mettre par-dessus celle d’Haneru, puis il approcha délicatement son visage pour l’embrasser…

- Et est-ce que tu m’aimeras comme je t’aime ?
- Haneru, j’attends ces mots depuis si longtemps… Mes sentiments pour toi n’ont pas changé et ils ne changeront sans doute jamais.

~*~

Sur le chemin, Deshi croisa Yuko, assise sur un banc, encore peu habituée de sa présence, elle décida d’en apprendre un peu plus et s’assit à côté d’elle.

- Salut Yuko, je ne te dérange pas ?
- Non, répondit-elle en s’écartant pour laisser à Deshi la place de s’asseoir.
- Qu’est-ce que tu fais assise là toute seule ?
- Rien. Cet endroit m’apaise.

Deshi suivit le regard de Yuko. De là ou elles étaient, on pouvait voir la ville sous son aspect le plus calme. Bordée par les arbres, la ville semblait enfouie sous un manteau de verdure, où seuls certains édifices se mesuraient à la hauteur des centenaires.
Le temple, un peu plus loin sur la colline, se détachait clairement de cet ensemble homogène.

- Tu… tu allais souvent au temple petite, non ? Tenta-t-elle d’engager la conversation.
- Non. Je me souviens d’avoir été trop faible pour sortir. On me laissait à la maison.
- Ah oui, c’est Haneru qui allait prier pour toi, se rappelait Deshi.
- Et rien n’y faisait. Personne ne voulait rien entendre là-haut car j’étais toujours malade.
- Tu sais, il faut continuer à avoir foi car…
- Ah ! La religion… La religion ressemble au langage ou aux coutumes vestimentaires. On se définit par rapport à l'éducation que l'on a reçue… mais au final, je n’ai reçu aucune éducation. Je suis morte lorsque Kaho m’a enlevée et voila que je renais avec autant de souffrance, si ce n’est plus que lorsque j’étais enfant. Quelle foi veux-tu que j’aie ? S’emporta Yuko en regardant intensément Deshi.
- Je ne pense pas que la foi soit uniquement liée à la religion. Avoir foi en soi, c’est le plus important.
- A quoi ça sert ? Pour pouvoir proclamer que la vie a un sens ? mais en a-t-elle vraiment un ?
- Elle a le sens que tu lui donnes. Et à l’échelle humaine, ça suffit amplement, répondit Deshi en se levant, marquant ainsi la fin de la conversation. Bye, on se retrouve à la pension !

Deshi commençait à s’éloigner quand Yuko la rappela.

- Deshi !
- Oui ?
- Merci… de ne pas m’en vouloir.
- Oh, mais ce n’était pas vraiment toi. Par contre, je t’en aurai voulu si j’étais restée aveugle, plaisanta la jeune fille.

Yuko acquiesça sans sourire, et Deshi fut prise de compassion car elle sut que la sœur d’Haneru ne sourirait plus jamais.

~*~

Comprenant la portée de la mission de la jeune prêtresse, la ville lui pardonna vite, mais elle mit longtemps avant de choisir une autre prêtresse ayant un réel don et une réelle générosité.
Ce fut d’ailleurs un jeune prêtre, Cristoba qui la remplaça. Il paraissait bien plus vieux que son âge et ne se déplaçait qu’avec une canne et son vieux chien miteux. Ses commentaires étaient bien plus indéchiffrables – impénétrables dirons-nous par la suite – que ceux d’Hitomi, aussi, il s’attira vite la sympathie des habitants par ce côté extravagant qu’il insufflait au temple.
Et jamais il ne vit d’un mauvais œil le recueillement des Soldiers sur cet autel.

 

1- 2- 3- 4- 5- 6- 7- 8- 9- 10- 11- 12- 13- 14